Jacques Abeille, La vie de l’explorateur perdu

Le roman des ori­gines et celui de la fin

Dans ce livre du “Cycle des Contrées”, Jacques Abeille pour­suit ce qu’il avait entamé au milieu des années 70. A savoir l’exploration d’un monde ima­gi­naire qui débuta avec le roman “Les jar­dins sta­tuaires”.
Depuis,  son avan­cée  per­dure dans un uni­vers paral­lèle et fan­tas­ma­go­rique qui répond à ses propres règles, et — ajoute l’auteur — “vices”.

La vie de l’explorateur perdu clôt ce cycle en deve­nant “le roman des ori­gines et celui de la fin”. Lec­teurs et lec­trices sont ren­voyés der­rière les fan­tômes de Bar­thé­lémy l’écriveur et de Léo Barthe (le double de l’auteur) pour un der­nier adieu à Ludo­vic Lin­dien qui, toute sa vie, a cher­ché à se désen­cla­ver des murailles de sa situa­tion “sar­triebbe”. Mais désor­mais le lumière s’efface sur un tel monde.

Parfois au milieu des che­va­liers, à la lisière du souffle, le clair-obscur déroule sa mous­se­line de soie rouge. Des flammes oran­gées lèchent les vastes contrées dépeu­plées, troublent les fan­tômes, incen­dient les châ­teaux en ruine. Leurs ombres dansent parmi les pierres.
Pas une seule pluie sur la terre cra­que­lée. L’air enfié­vré, intro­verti, ne sait plus com­ment s’élever vers le bleu du ciel. La foudre par­fois craque une allu­mette, comme la gamine pauvre du conte d’Andersen, pour se sen­tir moins seule avant de mou­rir. C’est un orage de cha­leur, sans humi­dité et une ten­sion qui se décharge en sau­tant à la gorge des étoiles.

La pous­sière n’en reste pas moins intacte sur le che­min caillou­teux. L’opacité est totale, la zébrure des éclairs n’en est que plus par­faite, lyrique, éblouis­sante au milieux de brutes sans ima­gi­na­tion mais cruelles, même si le héros par­fois a pensé que de tels agis­se­ments était obso­lètes.
Le tout avant qu’un visi­teur invi­sible finisse par expli­quer ce qui arrive ou pas à qui l’écoute ou non.

Reste ce double manus­crit fait d’histoires et de dia­logues. L’auteur dit ne pas savoir ce qu’il advien­dra.
Mais celles et ceux qui le lisent ne le croient pas.

jean-paul gavard-perret

Jacques Abeille, La vie de l’explorateur perdu, Le Tri­pode, Paris, 2020, 304 p. — 19,00 €.

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