Le square (Marguerite Duras / Bertrand Marcos)

cré­dit pho­to­gra­phie Karim C. 

Une minu­tieuse dis­sec­tion de l’attente

Un qui­pro­quo donne l’occasion à une conver­sa­tion de s’engager entre deux per­sonnes dans un square. Quoi de plus banal ? Dans ce lieu pro­pice à la réflexion, où l’on vaque en por­tant aux autres une atten­tion flot­tante, où les ren­contres n’engagent à rien, le dia­logue se déve­loppe autour de ques­tions ini­tia­le­ment ano­dines. On ne sait pas à qui on a affaire, alors on mène l’enquête avec réserve.
Puis, comme les par­te­naires se prêtent au jeu et semblent y prendre goût, les inter­ro­ga­tions de plus en plus per­son­nelles, intimes, per­ti­nentes conduisent à des confi­dences. C’est par­fois tel­le­ment plus simple de dire ce qui anime vrai­ment et ce qui pèse dans l’espace d’une ren­contre éphé­mère. On se rap­proche et s’oppose sans savoir exac­te­ment sur quoi. Est-ce qu’on cherche le chan­ge­ment ou la per­ma­nence ? Et dans quel domaine de sa vie ?

Plus on parle, plus on s’expose, plus on se révèle, plus on se dis­tingue, plus on se recon­naît. Les échanges s’aventurent dans une illus­tra­tion cari­ca­tu­rale ou iro­nique de la dif­fé­rence des sexes, se hasardent à une dis­sec­tion de l’attente. Des accents par­fois pathé­tiques s’expriment au moment où cha­cun en vient à dire ses fai­blesses consti­tu­tives et ouvre sans pré­ten­tion, comme avec contri­tion, une confes­sion qu’on sent inédite.

Un texte atta­chant qui, à tra­vers des bana­li­tés, dit des choses essen­tielles. Des tour­nures méta­phy­siques, mais sur un ton qui reste léger. Des répliques ténues, mais qui se tissent comme inopi­né­ment, de façon déliée et plai­sante. Des moments d’espoir, des temps de décou­ra­ge­ment, une huma­nité sen­sible, sai­sie au fil de ses for­mu­la­tions fra­giles, tein­tées du conflit entre illu­sion et réa­lité.
Peu à peu s’esquisse le rap­pro­che­ment entre les deux êtres : leur rete­nue, leur écoute, leur atten­tion confine à l’attachement. L’auteure s’amuse à appro­cher les parages de l’intrigue amou­reuse sans y verser.

Une adap­ta­tion per­for­mante, le jeu sub­til et impli­qué des deux comé­diens contri­buent à cet incon­tes­table succès.

chris­tophe gio­lito & manon pou­liot

Le square

de Mar­gue­rite Duras

Adap­ta­tion et mise en scène Ber­trand Marcos

Avec Domi­nique Pinon et Méla­nie Ber­nier
Lumières Patrick Cli­tus ; scé­no­gra­phie Jean Haas ; cos­tumes Marion Xar­del ; son Sté­pha­nie Gibert ; pro­duc­tion Anti­sthène ; coréa­li­sa­tion Théâtre Lucernaire.

Au théâtre Le Lucer­naire 53, rue Notre-Dame-des-Champs 75006 Paris

Durée du spec­tacle 1h15. Du 9 sep­tembre au 8 novembre 2020.

Du mardi au samedi à 21h et le dimanche à 18h. (01 44 45 57 34)

http://www.lucernaire.fr/theatre/4069-le-square.html

 

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