Un univers sans cesse renouvelé !
Ils étaient cinq, Yann, Leïla, Camille, Terry et Dodgi, cinq enfants de cinq à douze ans qui se sont réveillés un matin dans une ville où tous les habitants ont disparu. Ils vont devoir se débrouiller …seuls, ayant basculé dans un univers post-mortem, au cœur des limbes. Mais, ils ne restent pas seuls bien longtemps ; très vite, ils font des rencontres, certaines insolites, d’autres dangereuses, voire mortelles.
Ils retrouvent également des enfants ayant organisé des sociétés calquées sur celles des adultes, ne retenant que le pire.
Le douzième et présent tome s’ouvre avec Saul qui, grâce à des pouvoirs de télékinésie s’est imposé sur le trône de Néosalem. Ces pouvoirs semblent avoir disparu, ce qui lui ferait perdre sa légitimité. Il a réuni le conseil des Sages car des tensions sont apparues dans la ville suite au marquage au fer rouge, sur le front, des enfants de la 8ème famille. C’est la famille tout en bas de l’échelle sociale, celle des Sans-nom. Pour calmer ces tensions, il propose d’organiser des jeux du cirque.
Leïla est parmi les “gladiateurs” qui vont devoir, dans le jeu de Colin-mitraille, faire face à un candidat déchu de la 6ème famille armé d’une mitrailleuse. Saul veut se venger de Leïla qu’il accuse de collusion avec Camille, qui est devenue, au terme d’aventures épiques, l’Élue du Mal.
En réponse à une aide extérieure qui fait tout pour faire évader Leïla, celle-ci propose à ses amis d’organiser la fuite de tous les enfants de la 8ème famille, les esclaves…
Fabien Velhmann, dont on connaît l’imagination plus que fertile, se surpasse avec cette série où il propose, sur différents degrés, une belle galerie de personnages aux caractères recherchés. S’il présente une suite d’aventures débridées mettant en scène des enfants et des pré-adolescents, il place un second, voire un troisième degré en jouant sur des notions de philosophie, de passage d’un âge à un autre. Il fait également revivre, par des enfants, les grandes fonctions tenues dans nos sociétés, en désigne les carences, les ruptures, les excès…
Il fait montre d’une capacité à renouveler cet univers de façon rationnelle tout en privilégiant l’aventure et l’action.
Même si cette série est destinée d’abord à un jeune public, celui des adultes trouve matière à se régaler tant les péripéties et le second degré sont délectables. Bruno Gozzotti, ce dessinateur sorti de l’énorme pépinière que sont les Instituts Saint-Luc en Belgique, assure d’un trait énergique la mise en images de cet univers. Il donne des personnages toujours parfaitement identifiables, à l’expressivité réaliste. Les actions sont relayées avec dynamisme et le travail sur les angles de vues toujours remarquable.
La mise en couleurs tonique d’Usagi conforte le graphisme de belle manière.
Avec Seuls, on aborde la belle bande dessinée à l’intrigue solide et brillante, au graphisme soigné et étudié.
serge perraud
Fabien Vehlmann (scénario), Bruno Gazzotti (dessin) & Usagi (couleurs), Seuls – t.12 : Les révoltés de Néosalem, Dupuis, juin 2020, 48 p. – 10,95 €.