De la constance vitale
C’est en repassant de formes dites savantes ou purement discursives à un retour à des formes “simples” qu’une extension de l’art reste toujours possibles : Giudeppe Penone ne cesse de le prouver. Et il rappelle ici que chacun est poursuivi par le fantôme de divers arbres. Autour d’eux louvoie une forme de volupté.
L’artiste entre en leur vibration ou rebondit sur leur “peau” d’écorce entre imbrications et distances. Parfois, l’arbre reste un corps lointain , nous en sommes séparés. Parfois. Ils deviennent une silhouette d’attente tout en restant le rempart d’un monde premier.
L’arbre nous arrache à nous-mêmes. Son injonction silencieuse est le seul recours car chacun voudrait toujours être en son centre tant il est le coeur de ce que nous ressentons. Il demeure l’élan vital et le refuge : “Venez dans notre royaume” semblent dire de tels arbres et à travers eux le temps n’en finit pas de s’incarner.
Ces “figures” sont la source à laquelle s’abreuvent tous les rameaux de la vie. Et si nous nous frottons contre eux ils en gémissent et divisent l’espace pour en emporter le quotient.
Chez Penone, les arbres ne sont donc pas seulement des masses : ils forgent la poussée vers une profondeur close et a priori irreprésentable. Pourtant, il y a le miracle de l’image qui n’en finit pas de l’ouvrir.
Elle place celle ou celui qui la regarde comme l’arbre lui-même saisi dans divers axes d’interférences. Ce dernier essaime en des instances et des prises qui ne cherchent pas forcément à l’immobiliser mais à lui donner une constance vitale.
Il devient interstice et un contrepoint à la présence humaine.
jean-paul gavard-perret
Giuseppe Penone, Arbres, avec un texte d’Henry-Claude Cousseau, Editions Méridianes & Bernard Chauveau Editions, 2020
Magnifique de vitalité et de profondeur! Etreindre les arbres et se laisser porter plus loin encore en leurs-nos racines intérieures avant que la vie ne rejaillisse par surprise.