Roberto Ohrt & Axel Heil, Aby Warburg, Bilderatlas Mnemosyne. The Original

Carto­gra­phie mémorielle

Aby War­burg (1866–1929), fils d’une famille de ban­quier de Ham­bourg, finit ses études par un doc­to­rat sur le peintre de la Renais­sance ita­lienne San­dro Bot­ti­celli. Et, en écho, il étu­die les divers inter­pré­ta­tions des mythes, image, rites de diverses cultures.
Par delà, il ren­verse l’interprétation de l’histoire de l’art et des images et il va deve­nir le poète de l’iconologie moderne.

Roberto Ohrt et Axel Heil ont cher­ché dans les quelques 400 000 pho­tos de la col­lec­tion du War­burg Ins­ti­tute de Londres les images ori­gi­nales de son Atlas. Et leur tra­vail est une avan­cée majeure dans l’étude du sémiologue.

Le Bil­de­rat­las Mne­mo­syne (Atlas Mné­mo­syne) est une œuvre ori­gi­nale et unique. Elle renou­velle les condi­tions de lec­ture et d’interprétation des images. Ce cor­pus  inachevé a été conçu en étroite rela­tion avec la biblio­thèque d’Aby War­burg ouverte en 1926 à Ham­bourg qui por­tait l’inscription « Mné­mo­syne » au-dessus de sa porte d’entrée.
Riche de près de 60 000 volumes et de plus de 25 000 pho­to­gra­phies, cette “Kul­tur­wis­sen­schaft­liche Biblio­thek War­burg” (KBW) pré­sen­tait un clas­se­ment repo­sant sur les grands thèmes sur les­quels tra­vaillait son fon­da­teur, prin­cipe qu’il a repris pour l’organisation des planches illus­tra­tives de son atlas.

L’objectif pre­mier  de son auteur était de mener une his­toire com­pa­ra­tive de l’art basée uni­que­ment sur l’image. Pour cela, il a réuti­lisé pour cer­taines planches des illus­tra­tions préa­la­ble­ment recen­sées à l’occasion de confé­rences ou d’expositions orga­ni­sées au sein de sa biblio­thèque. Dès lors, un tel atlas fait moins de ” pages ” au sens habi­tuel du terme que de tables et planches où sont dis­po­sées des images sur fond noir.
Elles étaient épin­glées pour être pho­to­gra­phiées voire modi­fiées. Par le mon­tage de celles-ci, War­burg déve­loppa à par­tir de 1926 une nou­velle approche de l’iconographie, de la sémio­lo­gie et des sciences humaines en éta­blis­sant des cor­res­pon­dances inat­ten­dues entre des repro­duc­tions d’œuvres par­fois très éloi­gnées dans le temps, le style et la technique.

Son but prin­ci­pal était de déce­ler les sur­vi­vances des for­mules du pathos (ce qu’il nomma la “Pathos­for­meln”) à tra­vers les repré­sen­ta­tions des émo­tions issues de l’art de l’Antiquité et leur résur­gence pen­dant la Renais­sance.
Il nomma Atlas ce pro­jet de car­to­gra­phie mémo­rielle et mou­vante du savoir visuel, inter­rompu par sa mort en 1929, “mais de toute évi­dence inache­vable dans son essence” comme l’écrit Didi-Huberman pour lequel le sémio­logue reste un maître à penser.

jean-paul gavard-perret

Roberto Ohrt & Axel Heil, Aby War­burg, Bil­de­rat­las Mne­mo­syne. The Ori­gi­nal, Hatje Cantz, Ber­lin, 2020, 184 p. - 200,00 €.

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