Guillaume Dustan, LXIR

Le corps de la civi­li­sa­tion occi­den­tale est celui d’un mutant hédo­niste et hyper-lucide qui pra­tique la transe dans les clubs

Sex magic

Distiller un élixir digne de ce nom n’est pas donné au pre­mier venu. Harry Pot­ters en herbe, arrê­tez de geindre, si tout était facile, quel serait l’intérêt ?
Non, l’élixir en ques­tion relève de la magie sexuelle, tra­vaux pra­tiques indis­pen­sables. En ce début 2002, les cow-boys suprêmes, les her­bo­ristes de la conscience, les alchi­mistes de la société humaine, se retrouvent en raves ou en soi­rée hype pour par­ta­ger leurs décou­vertes sur un mix de La Chocha.

Boosté aux desi­gner drugs conçues pour étendre les per­cep­tions, ana­to­mi­que­ment modi­fié pour la beauté du geste, conscient de l’importance de l’énergie [good vibra­tions !] extrê­me­ment empa­thique, le nou­veau corps de la civi­li­sa­tion occi­den­tale est celui d’un jeune mutant hédo­niste et hyper-lucide qui pra­tique aussi la transe dans les clubs.

Concen­tré de super héros

Lorsqu’on imbibe le papier d’élixir, on obtient un livre [acide]cinglé[siglé]LXIR. Quin­tes­sence en 174 pages d’idées autour du thème qui l’a tou­jours ins­piré : la libé­ra­tion. Des théo­ries embrouillées, malaxées, libre­ment asso­ciées mais sur­tout vivantes ! Par ce troi­sième mou­ve­ment dans la tri­lo­gie des pam­phlets poli­tiques, Guillaume Dus­tan tente de dédra­ma­ti­ser la vie quo­ti­dienne avec une Fran­chise qui peut dérou­ter ou convaincre. Quelle est sa prio­rité : la néces­sité de bien se faire com­prendre. C’est vrai que ce n’est pas tou­jours facile, même au début d’un nou­veau mil­lé­naire, d’évoquer les moyens de libé­rer la nou­velle géné­ra­tion en exi­geant la liberté totale pour tous ceux qui la dési­rent. La vieille garde, ancrée dans les modèles d’un autre âge, une sorte de Juras­sic Park bardé de prin­cipes qu’ils vou­draient bien faire pas­ser pour uni­ver­sels, n’entend pas se lais­ser faire. L’évolution des mœurs, toute iné­luc­table soit-elle, va devoir ren­ver­ser les pré­jugé et balayer les frus­tra­tions. Un de ses super héros est un écri­vain anti­con­for­miste aussi pointu que brouillon, qui n’hésite pas à se mettre à poil et à éja­cu­ler son LXIR avec classe et effi­ca­cité : Guillaume Dus­tan, créa­teur du Rayon, col­lec­tion G-Evolutionnaire chez Balland.

C’est bon, d’être barge. C’est con, d’être bourge.

Dans les médias, Dus­tan est para­doxal ; volon­tiers vision­naire, par­fois inco­hé­rent, tan­tôt pro­vo­ca­teur, tan­tôt odieux, ou alors à fleur de peau. Objet de fas­ci­na­tion, il joue de l’apparence pour mieux faire res­sor­tir le dis­cours, mais il ne nous laisse jamais oublier que lui aussi a conquis de haut vol le droit de jouir. Au cœur, (enfin, plus bas) de son pro­jet de société, la sexua­lité libre et non frus­trée, la tolé­rance et mieux l’encouragement des dif­fé­rences, le déco­dage des vieux rouages qui façonnent encore tout un cha­cun à tra­vers l’éducation. Com­men­çons par l’orthographe : c’est bien un des sacro-saints sys­tèmes, si dif­fi­cile à remuer, non ? Prise de pou­voir sur les mots, sur leur forme par Dus­tan, qui pro­pose de belles démons­tra­tions de nov­langue dans LXIR, mêlant majus­cules, nou­veaux [cOdes visuels], switch ins­tinc­tif entre l’anglais, le fran­çais, la pho­né­tik, la poE­sie en Folie boxée à l’holorime Queue cachent des pages ratu­rées méri­tant d’être déKO­dées. Exer­cice périlleux, vous voyez, c’est pas donné à tout le monde, je vais donc reprendre ma voix de la facilité ;-)

 

Test de Q (i)

A agi­ter les idées, on fait voler la pous­sière et éter­nuer les réac­tion­naires, aller­giques on le com­prend au risque qu’ils per­çoivent dans tout chan­ge­ment. Reste à savoir si le monde selon Dus­tan existe déjà vrai­ment. Eh, les djins, vous les jeunes sur qui repose l’espoir de voir toutes ces visions s’incarner, montrez-vous ! Avez-vous bien les moyens de hur­ler « Merci à la LIFE ! » comme Guillaume Dus­tan ? Et si vous n’êtes pas en train de vous écla­ter, savez-vous au moins pour­quoi ? Etes-vous conscients du car­can ? Nous avons peut-être une chance : le space cow-boy Dus­tan a l’air de croire encore aux lois consti­tu­tion­nelles (peut-être son héri­tage d’énarque ?). Il vou­drait bien nous aider à reprendre le droit. Le droit d’être qui on veut, de vivre comme on l’entend. Douzes clefs pour rat­tra­per le retard qu’ont pris les codes et les lois actuels sur la pen­sée, sur la vie quo­ti­dienne, sont pré­sen­tées dans LXIR sous la forme d’un Cata­logue de Mesures à Dis­cu­ter (d’Urgence) pour la Présidentielle.

French touch

Entre­tiens, conser­va­tions cap­tées sur le vif, mes­sages à son por­table, on découvre dans LXIR un échan­tillon­nage de la vie pas si cou­rante que ça à la façon Dus­tan. Et si ce n’est pas carré, on s’en branle avec un grand sou­rire de satis­fac­tion. Ici, on aborde les ter­ri­toires de la perte de contrôle : dans le sexe, dans l’amour, dans les ambitions.

Vraie star, loin de l’académie, Gwilliaume Dus­taaaa­niac est de retour parmi les vivants. Comme il le constate lui-même : « Je n’en suis pas mort. » Non, per­sonne n’aura sa peau. Et comme ce qui ne tue pas rend plus fort, Guillaume ver­sion 2002 arbore le totem du TORO tatoué entre les épaules, et les couilles qui vont avec pour mieux te bai­ser mon enfant.

stig legrand

   
 

Guillaume Dus­tan, LXIR, Bal­land Le Rayon, 2002, 174 p.

 
     

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