2035 : L’odyssée de l’espèce
L’histoire
2035 : le futur n’est pas si loin et désormais les robots font partie intégrante de la vie quotidienne. Nul ne remet en cause leur fonction prédominante et leur rôle indispensable au sein de la société …sauf le détective Spooner (Will Smith) qui semble leur en vouloir pour une raison personnelle.
Un ressentiment qui se concrétise pleinement lorsque le policier nostalgique de l’époque rétro (les années 80 !) se voit confier l’enquête sur le suicide de l’éminent professeur Lanney qui a permis le développement actuel de la robotique. Spooner soupçonne, seul et contre tous, qu’il s’agit là d’un meurtre qui est l’ oeuvre d’un robot…
Tue-moi, je te dirai qui tu es
Cela commence comme le meilleur des mondes et finit comme le pire des cauchemars. On n’en attendait pas moins il est vrai d’Alex Proyas, réalisateur de The Crow puis de Dark City, d’ores et déjà film culte pour les adeptes de science-fiction. Dans ce monde si proche de nous, les robots sont devenus les objets les plus bénins qui soient (près d’une machine pour cinq habitants ! tout de même), ils servent à porter les sacs gérer les enfants, assurer la cuisine et sont parfaitement intégrés à la vie sociale de Los Angeles.
Un développement rendu possible parce que ces machines hautement perfectionnées obéissent à l’homme au doigt et à l’œil, programmées qu’elles sont à l’origine pour ne causer aucun mal à l’homme. Une éthique que résument les trois lois inventées par le professeur Lanney qu’on vient de retrouver mort, apparemment “suicidé”, dans le hall de la firme de l’USR, laquelle est sur le point de lancer sur le marché des milliers de modèles du robot dernier cri que vont s’arracher tous les foyers, le NS-5.
Empruntées par Proyas aux concepts de robotique des romans d’Isaac Asimov, ces trois lois essentielles posent qu’un androïde ne fera jamais de mal à un homme, qu’il doit obéir aux ordres de l’homme (sauf s’ils sont contraires à la première loi), et protéger son existence, mais sans être en contradiction avec les deux premières lois. Théoriquement inoffensives, ces machines sophistiquées pourraient bien cependant avoir acquis des facultés quasi mentales et des affects qui les rapprochent de plus en plus des passions humaines, raison pour laquelle l’inspecteur Spooner suspecte l’une de ces machines, qui répond au doux nom marketing de Sony d’avoir tué la victime.
A la lumière de ce soupçon, la question cruciale que nourrit le film consiste bien à savoir si l’usine qui programme les robots n’a pas surdévelopper les limites de leurs capacités, contribuant ainsi à faire de l’intelligence artificielle, si bien implantée en son sein, la pire menace pour l’humanité.
Robot le conquérant
Le canevas, très (trop ?) librement adapté des nouvelles d’Isaac Asimov, n’est certes pas des plus transcendants, pas de quoi se relever la nuit apparemment, mais la surprise de taille, qui justifie à elle seule qu’on ne fasse pas l’économie de ce titre, tient, outre les rebondissements de l’enquête nous interpellant sur les dérives possibles d’une société robotisée, dans les scènes d’actions époustouflantes qui sont légion ici.
Que l’homme soit dominé un jour par les machines qu’il a lui-même inventées, en un complexe à la Frankenstein, à la 2001 : L’odyssée de l’espace, à la Terminator ou encore à la Minority Report, passe encore, mais qu’il doive être amené à débrouiller l’écheveau de la vérité en un dialogue avec un robot à l’humanité presque effrayante qui lui tient la dragée haute, voilà qui mêle agréablement ironie et catastrophisme hig tech.
Tout tient en ce que, grâce au progrès des nannotechnologies, on constate dorénavant que, ” en chaque robot, il existe des fantômes. Des protocoles non anticipés qui posent la question du libre arbitre, de la créativité, de l’âme.” Un gouffre abyssal, philosophique et technique, dans lequel se rue avec maestria Proyas, qui en met plein la vue en confiant la vedette du film à Sony, aux incroyables performances louchant versMatrix et en échafaudant de toniques séquences au ton entre prophétie et apocalypse : quand un blockbuster impeccable rencontre la réflexion du Maître Asimov, spectacle garanti !
D’autant que le dvd, déjà honoré par une superbe qualité d’image, propose une explosive piste DTS (version française), avec un jeu des basses qui percute à l’unisson des scènes d’actions et des immenses décors : c’est peu dire qu’on en prend plein les oreilles et qu’on en redemande. Le 5.1 est, lui, de tenue plus calme (en VO et VF) même s’il s’agit là d’une version des plus acceptables.
Humain, pas assez humain
Aux cotés de ce bougre de métal sautillant au visage et lisse et légèrement transparent (des sorte d’I-Mac sur pattes si l’on veut), animé par le processus de Motion Capture — principe qui consiste à capter les mouvements d’un acteur pour animer un personnage en images de synthèse -, Spooner est d’autant plus crédible dans la posture de l’humain dépassé par le pacte faustien signé avec sa créature qu’il affiche non sans morgue une cool attitude où l’attrait pour le ” old school ” ou le rétro (le culte de baskets Converse has been) le dispute au trip réac’ (briser tous ces tas de ferraille pour voir si quelque chose comme une ” âme ” pourrait s’y nicher et résister au réel).
Si les deux font si bien la paire dans I, robot, c’est aussi parce que, pour des raisons qui apparaissent dans le dernier tiers du film, Spooner est beaucoup plus proche qu’on pourrait le penser de ceux qu’il fustige à longueur de temps. Il est en effet hanté par la culpabilité d’avoir survécu à un accident dont l’a sauvé un robot et manifeste depuis tous les symptômes de la paranoïa…
Deux héros de chair et de logiciels, trois règles invariantes, un seul monde à partager. Dans tous les cas, c’est bien la notion d’orgueil, la démesure de l’hubris stigmatisée par les Grecs, qui est au coeur du scénario (à l’instar hélas de pléthore de marques déposées qui transforment I, robot en véritable plate-forme publicitaire, ce qui est regrettable, disons-le ; mais Audi et Fedex en ressortiront certainement grandis…) : tout se passe en effet comme si, qu’on penche du côté de l’homme ou de l’androïde, c’étaient les critères mêmes de la rationalité de l’intelligence (naturelle ou artificielle) qui se trouvaient mis sur la sellette puisque toujours en retard sur la vanité fratricide et liberticide du ” sujet supposé savoir ” prêt à tout pour faire de sa connaissance un centre de domination sur les autres.
Bref, un appareil à discriminer et rejeter (l’on songe au mythique La planète des singes, dans sa première version), d’autant plus dangereux quand il est flanqué d’une capacité à la computation infinie des possibles. Cyber ou bio, les arcanes de la psychologie demeurent in fine autant inaccessibles qu’insondables, hormis la passerelle que constitue l’humour et le mot d’esprit : tant mieux ou tant pis ?
Du côté des Bonus (dvd collector)
Une édition qui ravira les amateurs de suppléments. Si le making of disponible sur le premier disque et dédié aux effets numériques (androïdes et concept cars) est un peu court — complété cependant par le bonus : CGI et DESIGN qui revient sur l’esthétique des décors, le look des robots ainsi que les techniques d’infographie utilisées pour in-former les visions du réalisateur — , les trois commentaires audio qui s’ensuivent retracent comme il se doit toute l’histoire et les efforts requis pour la construction des décors et des effets visuels.
À noter la volonté de réalisme affichée par Proyas et le scénariste Akiva Goldsman dans le premier commentaire.
frederic grolleau
I, Robot
Réalisateur : Alex Proyas
Avec Will Smith, Bridget Moynahan, Chi Mcbride, James Cromwell, Bruce Greenwood
Genre : Science-Fiction
Duree : 2H00 mn
Image : DVD 9 — 16/9 compatible 4/3 — Format 2.35
Son : Français 5.1 DD et DTS, Anglais 5.1 DD
Sous-titres : Français, Anglais, Arabe
Editeur : Fox Pathé Europa
Date de parution le 28 Janvier 2005
Disponible en édition simple et en édition collector double dvd
Prix : 30, 00 €.
Bonus (dvd collector) :
Commentaire audio du réalisateur Alex Proyas et du scénariste Akiva Goldsman.
Commentaire audio de l’équipe technique
Commentaire audio du compositeur de la musique Marco Beltrami JOUR APRÈS JOUR : le journal de production de I, ROBOT.
CGI et DESIGN
MACHINES SENSIBLES : Comportement robotique
LES TROIS LOIS : Entretiens sur la science-fiction et les robots Interviews des scénaristes Jeff Vintar et Akiva Goldsmann, de Robyn Asimov (fille de l’écrivain Isaac Asimov) et de Jennifer Brehkl, éditrice.
LES OUTILS DU RÉALISATEUR Scènes inédites (4) et analyses visuelles des composites des plans à effets spéciaux de — I, ROBOT, créés par les studios Digital Domain, Weta Domain et Rainmaker.