La guerre à l’envers ou l’Amazone de l’amour
Citoyenne de monde, Billie Zangewa est née au Malawi mais a grandi au Bostwana et vit en Afrique du sud, ce qui a causé en ses crises existentielles des ruptures avec ses racines. Son oeuvre tente de les recoudre. Mais pas seulement.
Toujours en relation avec le monde tellurique, la créatrice y danse à travers ses créations qui joignent le passé au présent, l’intime à l’universel.
Celle dont le rêve d’enfant était de devenir artiste et de voyager tout autour du monde en apprenant des choses sur les autres cultures a pu le réaliser. Son oeuvre est toujours en contrepoint aux affres du monde.
L’œuvre est l’expression d’une résistance, d’une souffrance, d’une progression, d’une retenue, d’une violence, d’une douceur, d’un féminin, du Désir. C’est un acte visuel vivant et prodigieux, il vibre du corps céleste et charnel en révolution d’où jaillissent les pulsations du cosmos et d’éblouissantes tensions de chair au sein d’auras, là où mystère sensible de la beauté reste irrésolu.
La révélation s’épanouit dans le mystérieux flottement et l’oscillation délicate de l’au-delà et l’en deçà, de l’en haut et l’en bas, du présent et de l’absent, de l’animalité et de l’âme. Cela rend la créatrice animiste charnelle. Chez elle, le corps rompu des femmes reste héroïque.
Et ses images sont des façon de renverser des règles du masculin et de la guerre dans la lumière et la matière du noir et blanc, en ce qui tient d’un dévoilement du voilement mystique. Les corps de ses femmes se vidangent de l’amour, s’en remplissent. Voilà par où le corps passe et ne passe pas, là où la monstration entraîne dans cette étrange altérité du pur désir — ou du désir pur.
Si bien que l’art devient un désir qui pense. Il en va de l’expérience du regard là où il n’existe ni véritable transparence, ni totale transcendance.
Reste l’attente de ce qui sauve : à savoir l’amour.
jean-paul gavard-perret
Billie Zangewa, Soldier of Love, Templon, Rue Beaubourg, Paris du 14 mars au 9 mai 2020.