Isabelle Dethan arrive chez Dargaud. Cette artiste complète, assurant souvent scénario, dessin et couleurs, s’est déjà illustrée, chez Delcourt, dans le Fantastique avec, par exemple, les séries Mémoires de sable et Le Roi cyclope. Elle a signé des récits plus intimistes comme Tante Henriette ou Eva aux mains bleues. Mais, elle excelle dans le genre historique, avec des histoires se déroulant autour du bassin méditerranéen tels que Les Terres d’Horus.
Elle revient, avec ce diptyque, dans l’Egypte antique, l’action se déroulant au VIe siècle avant J.-C.
À Saïs, Neith, une des filles de Pharaon, attire le regard de son père, par sa beauté et par sa grâce, quand elle danse pendant une cérémonie religieuse. Il la choisit pour effectuer la danse sacrée de la purification. Une de ses sœurs lui conseille de la rater si elle ne veut pas finir dans le lit de son père. Mais, ne voulant pas se ridiculiser devant toute la cour, elle effectue une danse proche de la perfection.
Elle se réfugie sur une terrasse où Sennedjem, un de ses frères, la rejoint. Celui-ci s’inquiète de sa situation. Lui-même, n’est qu’en dixième position pour l’accession au trône. Il ne veut pas,être le larbin d’un de ses frères. Il a décidé de fuir et propose à Neith de l’accompagner. Élevés à la cour, ils ne connaissent rien de la vie hors de cette enceinte protégée, de l’existence à l’extérieur…
Dans ce récit, Isabelle Dethan met en scène, à travers le parcours erratique de deux princes de sang, la rivalité entre l’Égypte antique et le royaume de Babylone. Elle ne ménage pas ses deux héros, multipliant leurs avatars, les obstacles qu’ils rencontrent, les menaces, les dangers auxquels ils sont confrontés. Cependant, ils font preuve de pugnacité.
Ce premier volume est particulièrement riche en rebondissements, en stress pour Neith et Sennegjem.
Parallèlement, l’auteure décrit les modes de vie dans les deux royaumes, tant celle du peuple que celle des familles royales. Elle retrace les rapports entre les gens, les liens, la « nécessité » de préserver une pureté du sang, la volonté de conquête, l’accroissement des territoires, l’esclavage, les conflits armés… Elle peint le poids de la religion, la volonté de puissance des prêtres.
Le Roi de paille raconte le peu de liberté des composantes des familles royales dont le destin est fixé par des conventions, des règles rigides inventées pour privilégier et faire perdurer une dynastie, une caste, une communauté.
Le dessin réaliste met en valeur toutes les descriptions, les états d’âmes, les sentiments et les nombreuses émotions. S’appuyant sur une documentation solide, Isabelle Dethan met en scène le faste des cours, des cérémonies religieuses, des palais. Elle réalise des décors de qualité tant pour les maisons du peuple que pour les temples, détaillant aussi les accessoires de toutes natures, les vêtements, les bijoux.
Sa mise en couleurs, aux teintes chaudes, rend parfaitement l’atmosphère de son histoire.
Un premier album qui met en scène un récit passionnant.
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serge perraud
Isabelle Dethan (scénario, dessin et couleur), Le Roi de paille – t.01 : La Fille de pharaon, Dargaud, janvier 2020, 56 p. – 14,00 €.