Du moins, c’est ce que prétend Hélène Cixous. Voire.… Certes, il ne s’agit “que” d’un journal tenu par l’auteure de 1.1.2017 au 14.5.2019. Il est donc tout frais. Il émeut car il soulève la vie par celle qui fit — selon l’Ami (Derrida) — “la vie-même” et “L’âmour”.
Née à Oran, elle garde la même sensualité qu’un autre de ses compatriotes : Camus. Tout ce qu’elle écrit ici est de l’ordre de l’intime mais sans exhibition superfétatoire et selon des “Noces” plus sombres que l’auteur de “La Chute”.
Hélène Cixous écrit “La Littérature a toujours été l’attente de la vie” : mais ne se trompe-t-elle pas ? La littérature reste pour elle “l’adresse” de la vie. Et vice-versa. L’une croît sans fin dans l’autre dans un jeu de “repons” en un jeu langage. L’auteure le reprend afin, sinon de recréer, du moins de déplacer la langue maternelle.
C’est une manière de vider “l’appartemaman” moins pour se débarrasser de la disparition de la mère que de la mort qui trop souvent l’a hélée.
Dans un tel livre, tout se brasse entre passé et avenir. De la Shoah, à la guerre d’Algérie jusqu’à la vie d’aujourd’hui, qu’elle soit générale ou personnelle. Il y a surtout la liste — sans doute non exhaustive — “des chagrins précieux” et ce qui ne peut jamais disparaître de la psyché comme de l’emprise de son inconscient.
Le tout en une communion de l’exilée avec les autres et le monde, là où le journal rappelle tout ce qui reste. Encore. Et en lisière.
jean-paul gavard-perret
Helène Cixous, Nacres, Cahier, dessins d’Adel Abddessemed, Galilée, Paris, 2019, 176 p. — 16,00 €.