Georges Duby, Œuvres

Duby­do­chon

La col­lec­tion de la Pléiade depuis quelques années racle les fonds de tiroirs (D’Ormesson, Gary) et mul­ti­plie les réédi­tions (Proust, Kafka). A force de gran­dir, un tel empire s’étiole — même si éco­no­mi­que­ment par­lant il ne s’est jamais si bien porté. Ce double mou­ve­ment se pour­suit en cette fin d’année : d’un côté une réédi­tion de Miche­let, de l’autre de quoi le faire se retour­ner dans sa tombe avec l’intronisation dans la reliure pleine peau de Georges Duby. C’est dire que tout le cata­logue NRF va pou­voir y pas­ser — de Danielle Sal­le­nave à Marie Nimier.
Duby reven­di­qua une hon­nê­teté que nul ne pour­rait lui contes­ter. D’autant qu’il pré­cise sa pos­tu­la­tion : “je suis tout prêt à dire que ce que j’écris c’est mon his­toire, c’est-à-dire que c’est moi qui parle, et je n’ai pas du tout l’intention de mas­quer la sub­jec­ti­vité de mon dis­cours”. L’auteur veut donc s’inscrire dans l’esprit de Miche­let. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres. Miche­let écri­vait l’histoire selon un prin­cipe pros­pec­tif. Duby — quoiqu’étant consi­déré avec Lei­ris comme un des chefs de file de l’histoire et les sciences de l’homme — raconte l’histoire comme un roman gothique (qu’on pense à son por­trait de Guillaume Le Maréchal).

Beau­coup se plaisent à saluer le style de Duby. Sans doute parce qu’il rentre par­fai­te­ment dans un cer­tain aca­dé­misme lit­té­raire fran­çais. Il existe sans doute chez lui un souci de plaire au plus grand monde mais l’intérêt d’une telle oeuvre s’arrête là. L’auteur a dit vou­loir redé­fi­nir le tra­vail d’historien en reven­di­quant une pos­ture artis­tique. Voire…
Ses pré­ten­dues révi­sions des idées reçues dans la façon de révi­ser les pon­cifs des his­to­riens res­tent bien fri­leux. Il s’est plu à échap­per aux idéo­lo­gies, affirmait-il.

Pour autant, l’auteur ne fut ni plus ni moins qu’un enfant de son siècle. Ses décou­vertes res­tent minces et se manière de racon­ter ni plus ni moins qu’une com­mo­dité plus astu­cieuse. Duby pré­tend dire mieux mais n’ajoute pas grand chose à la décou­verte du passé. Par ailleurs, l’élégance est ici un pure for­ma­lisme.
Cela lui valut un pres­tige dans le petit monde des lettres et dans le jeu de recon­nais­sance de ses pairs. Il a donc fini natu­rel­le­ment à l’Académie Fran­çaise avant de publier son oeuvre maî­tresses Dames du XIIe siècle. Elles tom­bèrent à point nommé pour cares­ser l’époque dans le sens du poil.

jean-paul gavard-perret

Georges Duby, Œuvres, édi­tion de Felipe Brandi, pré­face de Pierre Nora, Gal­li­mard, coll. Biblio­thèque de la Pléiade n°641, 2019, 2080 p. — 65,00 €.

2 Comments

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2 Responses to Georges Duby, Œuvres

  1. Pingback: #PartageTaVeille | 25/09/2019 – Les miscellanées d'Usva

  2. Guillaume Basquin

    Merci ! Dans 2 ou 3 ans, à ce rythme-là, “Oui-Oui” en Pléiade ! (Je le veux !…)

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