Gess, Un récit des Contes de la Pieuvre — “Un destin de Trouveur”

Une superbe his­toire contée avec maestria 

Gess pro­pose un uni­vers où cer­tains pos­sèdent un Talent qui les place dans une situa­tion pro­pice à subir les jalou­sies de ceux qui en sont dépour­vus.
Dans cet uni­vers, autour de la Pieuvre, une orga­ni­sa­tion cri­mi­nelle ten­ta­cu­laire, il déve­loppe des récits avec des per­son­nages par­ti­cu­liers sous le terme géné­riques des Contes de la Pieuvre.

Le 28 mai 1871, Jean-Baptiste Frages écrit à Émile, son fils, avant d’être fusillé au cime­tière du Père-Lachaise. Il n’est pas inquiet car il sait, que du haut de ses neuf ans, celui-ci porte en germe un Talent. En 1888, deux poli­ciers traquent l’Hypnotiseur. Mais celui-ci prend pos­ses­sion de leur esprit. Il épargne Émile qui maî­trise le talent rare de Trou­veur et convainc l’autre de se sui­ci­der le len­de­main devant ses col­lègues. Il suf­fit à Émile de jeter un caillou sur une carte pour connaître le lieu où se trouve ce qu’il cherche. En ren­trant chez lui, il voit la rampe de la cage d’escalier sac­ca­gée. La concierge, cho­quée, explique que cinq hommes sont venus enle­ver Léo­nie, son épouse, et sa fille. Dans l’appartement, une boîte à cha­peau trône. Elle contient une main cou­pée por­tant la bague qu’il a offerte à Léo­nie ainsi qu’une carte de visite de la Pieuvre.
Le len­de­main, un homme l’emmène dans le quar­tier géné­ral de l’organisation. Il ren­contre La Bouche, l’un des quatre diri­geants. Son épouse et sa fille ont été enle­vées. Émile n’a pas d’autre choix que col­la­bo­rer avec les membres de cette mafia. Un poli­cier qui jalouse les por­teurs de talent et par­ti­cu­liè­re­ment Émile aa tout mettre en œuvre pour le faire tom­ber.
Mais le Trou­veur réussira-t-il à sau­ver les siens car…

Le récit qui se déroule en 1888. La traque est entre­cou­pée de très nom­breux flash-back expli­ci­tant nombre d’événements du passé, éclai­rant celui d’Émile, mais aussi celui de Léo­nie, leur ren­contre et les étapes de leur vie com­mune. Il est découpé en cha­pitres dont l’ouverture com­porte des réfé­rences à Jean-Jacques Rous­seau et à son Contrat social.
Le Trou­veur jette son caillou sur des cartes. Et celles-ci sont authen­tiques, ce sont celles qui étaient uti­li­sées dans la fin du XIXe siècle. Gess, avec son souci du détail et son per­fec­tion­nisme a été à la BNF pour trou­ver ces docu­ments, le plan de Paris en cou­ver­ture, la carte vélo­ci­pé­dique des envi­rons de la Capitale…

Avec un des­sin réa­liste, pré­cis, tonique, des cases tra­cées à la main de façon irré­gu­lière, avec des per­son­nages expres­sifs, des pay­sages et des décors inté­rieurs de toute beauté, Gess offre des planches inha­bi­tuelles. L’histoire du Trou­veur est com­plé­tée par un court récit de 2 planches inti­tulé Les 3 amours de la Bête, une his­toire qui se situe dans le même uni­vers et qui éclaire une par­tie de l’intrigue qui pré­cède.
Une fois encore, cet auteur com­plet démontre tout son talent à maî­tri­ser et magni­fier une intrigue, à la mettre joli­ment en scène. Un nou­vel album sin­gu­lier à mettre à son crédit.

serge per­raud

Gess, Un récit des Contes de la PieuvreUn des­tin de Trou­veur, Del­court, avril 2019, 224 p. – 25, 50 €.

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