Histoires de frères et d’amitiés
Pour inaugurer leur nouvelle collection et fêter leurs cinquante ans, les éditions Glénat ont fait appel pour la diriger à celui qui reste — entre autres - spécialiste du cinéaste italien Sergio Leone. Vont suivre dans cette collection des ouvrages du même type avec Dewaere, Hitchcock, Truffaut. Simsolo a eu la chance de rencontrer le réalisateur dont il est devenu l’ami. Il l’avait découvert à seize ans avec son peplum Le Colosse de Rhodes et il le rencontra — suite à un article qu’il lui avait consacré - à Cannes lors du festival et resta très proche de lui jusqu’à sa disparition.
Ce roman graphique par son histoire et ses dessins met en évidence l’humanité du cinéaste. Lequel, sans connaître l’anglais, a réalisé pourtant des westerns incontournables et a révélé des acteurs inconnus : Gian Maria Volonte, Lee Van Cleef par exemple.
Tous les acteurs aimaient tourner avec lui. Ils appréciaient sa sympathie et son sens de l’humour. De Niro qui voulait absolument tourner Il était une fois enAmérique resta séduit par Leone comme Clint Eastewood le fut. Leone sut transformer ce dernier en montrant comment il pouvait utiliser les démons qui l’habitaient.
Leone a prouvé combien il n’était pas obligatoire d’être Américain pour fabriquer les westerns. Il suffisait de recréer leurs fables premières que le livre souligne. Raconteur d’histoires et même s’il n’était pas destiné à un tel genre, il a trouvé là un fil qu’il a développé jusqu’à Il était une fois dans l’Ouest et Il était une fois la révolution avant de pouvoir réaliser son film majeur.
Le livre remonte jusqu’à la jeunesse de créateur, sa famille et son père qui lui-même fut cinéaste. Fasciné par les bandes dessinées, fils unique, il a toujours cherché dans ses films une histoire de frères et d’amitiés. Simsolo et Philan montrent combien l’oeuvre du réalisateur, riche de sa culture BD comme du surréalisme et écrivant ses scénari en les mimant, se prête au roman graphique.
Tarantino ou Wo s’inspireront plus tard de celui pour qui le cinéma, la BD et le roman noir se croisent. Mais Simsolo évoque aussi les rapports de Leone entre l’image et le son, Godard et Ennio Morricone dont, pour le réalisateur, le musicien devint “son premier scénariste”.
Faisant jouer sa musique sur les plateaux, Simsolo et son dessinateur illustrent comment cela se créait.
Le premier, lui-même acteur, n’a pourtant jamais joué dans un de ses films mais son livre devient une sorte de revanche sur cette absence.
jean-paul gavard-perret
Noël Simsolo & Philan, Sergio Leone, coll. 9 et demi, Glénat, Grenoble, 2019.