Dans les secrets d’une chambre d’hôpital
Nouvelle venue sur la scène littéraire britannique, Emily Elgar nous livre un suspense psychologique glaçant, où les mensonges et les secrets mènent au drame familial.
Tout commence par un accident sur une route de campagne déserte lors d’une nuit glacée d’hiver. Cassie, jeune femme sans histoire, est renversée par une voiture, et le chauffard commet un délit de fuite en l’abandonnant sur le bas-côté de la route. “L’obscurité semble l’attirer en son sein, en une étreinte glaçante tandis qu’elle remonte l’allée et s’enfonce dans une nuit épaisse comme de la mélasse (…). L’éclat soudain des phares de voiture derrière elle la fait tressaillir, comme si, en violant son intimité, ils la surprenaient en train de faire quelque chose que personne n’aurait dû voir…”
Cassie est alors plongée dans un coma artificiel, aux bons soins d’Alice, une infirmière chevronnée, qui aimerait bien comprendre ce qui s’est réellement passé cette nuit-là. Elle voit défiler les proches de Cassie à son chevet : tout d’abord son mari complètement perturbé par les circonstances étranges de l’accident, sa belle-mère apparemment très attachée à Cassie. Alice, qui s’est attachée à la jeune femme, aimerait voir l’enquête avancer, mais aucun élément nouveau ne semble surgir.
Pourtant, un homme connaît la vérité. Frank, qui partage la chambre de Cassie, lui aussi prisonnier de son corps. Atteint du syndrome d’enfermement, il sait que Cassie est en danger, mais il ne peut ni bouger, ni parler. Quelqu’un arrivera-t-il à mettre à jour toute la vérité ou Cassie disparaîtra-t-elle en gardant tous ses secrets ?
Ce premier roman aborde avec profondeur les ravages causés par un accident de la route auprès des proches d’une victime, mais pas seulement. L’auteure construit autour de cet accident une véritable intrigue psycho-policière, où les apparences disparaissent au fil des chapitres pour livrer une terrible vérité dans les dernières pages. Le chagrin causé par le coma artificiel dans lequel est plongée la jeune Cassie se craquelle progressivement pour faire place au doute quant aux sentiments réels des rares visiteurs de la patiente.
La vie dorée qu’elle menait était-elle vraiment le conte de fées dont elle avait rêvée dans son enfance ? Sa famille adoptive ne cherche-t-elle pas à faire d’elle son jouet ?
Autour de Cassie, virevoltent deux autres personnages des plus intéressants : Franck, qui ne peut communiquer avec son environnement, alors que son cerveau est tout à fait opérationnel, et l’infirmière Alice, en mal d’enfant, qui a beaucoup de mal à prendre du recul vis-à-vis de ses patients, et qui fera tout pour connaître la vérité sur ce qui est arrivé à Cassie.
Chacun a une vie personnelle assez compliquée, mais le fait que la narration soit alternée, et que l’intrigue soit tour à tour racontée par un de ces trois personnages permet d’éviter l’ennui, qui, ne le cachons pas nous guettait parfois au bout de quelques chapitres.
L’action ralentit parfois, mais la psychologie des héros est tellement bien ciselée que l’on finit ce livre en se disant que c’est vraiment un beau coup d’essai pour un premier roman.
franck boussard
Emily Elgar, Une présence dans la nuit, Le Cercle– Belfond, 2018, 400 p. — 21, 00 €.