“Pourquoi la photo ? J’en ai toujours fait, comme tout le monde. Jusqu’à il y a un peu plus d’un an, je faisais des photos que je qualifierais de « souvenir de voyage » dans lesquelles je recherchais une certaine harmonie pour faire une belle image”. Bref, Guillaume Varone pensait être un photographe lambda. Néanmoins, il captait des portraits qui n’avaient rien d’anecdotiques même lorsqu’ils étaient de famille. Grâce à Klavdij Sluban côté technique et Barbara Polla côté dynamique, le Lausannoios prend enfin confiance en lui.
L’artiste possède le sens inné du cadre et de la prise. Il comprend tout de suite (et ses portraits de femmes le prouvent) une idée instinctive de la lumière, de l’espace. Ses images ont l’air de monter (comme la musique pour d’autres) de l’intérieur.
Mais il y a plus. A savoir, ce qui fait de lui un “vrai” photographe. A travers ses prises, des questions surgissent. Elle répondent aussi à ce que, au fond de nous, nous avons besoin de savoir. De voyeurisme il n’est jamais question. Guillaume Varone nous dit qu’un corps existe et que les choses sont présentes. À nous de regarder calmement ce qui a lieu.
Une femme est photographiée. Nous ne connaissons pas son prénom, ni son nom, ni ses origines, ni sa vie actuelle. Nous savons une chose : le visage à travers lequel apparaît une intimité.
Tout de suite, nous sommes touchés par la pudeur et la profondeur qui se dégage de ses portraits. De face, de profil, de trois-quarts, de dos, une femme a quelque chose à nous dire. Est-ce une lumière travaillée, retravaillée par le photographe ? Un travail sur les ombres ? Sans doute. Les ombres mettent en relief l’expression. Les yeux sont grands.
Les traits du visage burinés ou parfaits donnent l’impression d’une gravité. Comme si l’existence était un acte grave, une trajectoire guidée par la conscience. Les visages sont traversés par le silence. Toutefois, l’artiste ne cherche pas une “picturalité mais une vérité d’appartenance par l’incorporation.
Notre oeil s’approche, nous « entrons » dans les images. Guillaume Varone nous propose une narration et une énigme. L’histoire d’une femme et sa chevelure. Dans une autre prise se dégage un profil. Le modèle se coiffe. Une autre est de trois-quarts. C’est le portrait d’une femme à la perruque. Deux femmes se jouxtent soudain pour un même visage. Ou l’inverse.
Histoire de mettre à nu une grâce, une origine par la chevelure et ce qu’elle sous-entend dans la culture et même dans la sexualité. Chaque visage lie aussi l’hier et l’aujourd’hui vers une autre histoire par cette prise de l’intimité “par les cheveux”. Il existe là une présence absolue de la femme. Au regardeur de l’interpréter.
lire notre entretien avec le photographe
jean-paul gavard-perret
Guillaume Varone,
- Début, Analix Forever, Genève, 2018
— Regard sur la Slovénie avec Klavdij Sluban, en cours.