Arnaud Delalande, Simona Mogavino & Carlos Gomez, Les Reines de sang : “Catherine de Médicis, la reine maudite” — volume 1

Les pre­mières années d’une femme qui a mar­qué notre Histoire

Ce pre­mier volet de la tri­lo­gie que les scé­na­ristes consacrent à cette reine s’attache à dépeindre son enfance, les évé­ne­ments qui ont bou­le­versé à jamais une enfant de huit ans, et son par­cours jusqu’à la cour de France. Les auteurs détaillent les dif­fé­rentes phases qui ont secoué l’Italie à cette période avec la guerre entre la France et l’Espagne, les trai­tés, les alliances pour lut­ter contre l‘hégémonie de Charles Quint.
Ils entrent dans le détail pour fait suivre tous les tenants et les abou­tis­sants, les volon­tés de supré­ma­tie tant spi­ri­tuelles que ter­ri­to­riales. Asseoir sa puis­sance sur les hommes est le souci de la papauté. Asseoir sa puis­sance sur des ter­ri­toires, et donc des richesses, est le souci des rois. Mêlant poli­tique et reli­gion, l’une ser­vant de levier à l’autre et vice-versa le récit res­ti­tue une situa­tion complexe.

Les armées de Charles Quint enva­hissent Rome, le 6 mai 1527. Il veut châ­tier le pape Clé­ment VII qui a monté, contre lui, La ligue de Cognac. Celui-ci dési­rait mettre un terme aux pré­ten­tions de l’Espagnol sur les ter­ri­toires de ce qui devien­dra l’Italie. Il s’est allié, pour ce faire, à la France de Fran­çois Ier, au duché de Milan, à Venise, Flo­rence…
À Flo­rence, la duchesse Cathe­rine, âgée de huit ans, veut sor­tir du palais qu’elle assi­mile à une pri­son Elle convainc son amie Luisa, la fille d’une ser­vante, de l’accompagner. Mais, fort des évé­ne­ments romains, Jacopo Nardi dénonce la débauche qui règne dans la cité. Il hurle après Laurent le Magni­fique et la famille dépra­vée des Médi­cis. Les fillettes sont en dan­ger car il appelle à l’émeute. Michel-Ange Buo­nar­roti les secourt mais Luisa meurt, ren­ver­sée par un che­val. Cathe­rine est éle­vée par sa tante, Cla­rice Strozzi, depuis que Dieu et la syphi­lis ont emporté les parents de la petite duchesse d’Urbino, peu après sa nais­sance.
Les Insur­gés prennent le pou­voir. Jacopo Nardi pro­clame la déchéance du régime des Médi­cis et ins­ti­tue la Répu­blique flo­ren­tine. La chasse aux Médi­cis est ouverte. Le palais est envahi. La petite Cathe­rine est cap­tu­rée pour être exé­cu­tée. C’est le Gon­fa­lo­nier de jus­tice, fraî­che­ment élu, qui lui sauve la vie, voyant en elle une mon­naie d’échange. Il décide de la confier aux reli­gieuses du couvent de Santa-Lucia. Or, ce couvent dépend des Domi­ni­cains qui détestent les Médi­cis. Com­mencent pour Cathe­rine de longs mois de souffrance…

Cette his­toire de l’Histoire est pré­sen­tée de façon dyna­mique, met­tant du piquant en entre­mê­lant aux grands évé­ne­ments des faits quo­ti­diens, des détails de l’histoire. Les scé­na­ristes appuient leur intrigue sur une recons­ti­tu­tion rigou­reuse, la réa­lité étant bien plus riche en rebon­dis­se­ments que pour­rait l’être une fic­tion. Le des­sin de Car­los Gomez est réa­liste, très réa­liste comme il sied à un récit de ce genre. Il offre des traits soi­gnés, des détails pré­cis, des scènes de foules comme des vues plus res­treintes pour mettre au jour des sen­ti­ments, des émo­tions. Et celles-ci ne manquent pas dans cette période par­ti­cu­liè­re­ment vio­lente, féroce. Mais, y a-t-il d’autres périodes ? N’est-ce pas aussi bru­tal, bar­bare ce qui se passe au Moyen-Orient, dans les zones sub-sahariennes… ?
La mise en cou­leurs de José Luis Rio res­ti­tue à mer­veille l’atmosphère qui pou­vait régner dans les cités quand, dans les inté­rieurs, l’éclairage pro­ve­nait essen­tiel­le­ment de flammes, celles des torches, des bou­gies, quand seule la lumière natu­relle éclai­rait les scènes diurnes. Des­si­na­teur et colo­riste réa­lisent un tra­vail remar­quable sur les cos­tumes, les objets et usten­siles du quo­ti­dien, sur les armes et les mobi­liers des décors et sur les dif­fé­rents monu­ments où se déroulent les actions.

Un pre­mier volet attrac­tif pour la qua­lité et la pré­ci­sion du récit, pour un magni­fique gra­phisme réaliste.

serge per­raud

Arnaud Dela­lande & Simona Moga­vino (scé­na­rio), Car­los Gomez (des­sin), José Luis Rio (cou­leur), Les Reines de sang : Cathe­rine de Médi­cis, la reine mau­dite — Volume 1, Del­court, coll. “His­toire et His­toire”, sep­tembre 2018, 56 p. – 14,95 €.

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