Celui qui a renoncé à l’éloquence et à l’équilibre : entretien avec Gaël Pietquin

Gaël Piet­quin fait figure d’ovni dans le pay­sage lit­té­raire. Il ignore la culture de l’ego et vit qua­si­ment reclus en se moquant des réus­sites de coq. Il se veut de posi­tion mis­sion­naire mais il cultive son syn­drome du pro­sé­ly­tisme plus pour les autres que pour lui — ce qui repré­sente une aber­ra­tion dans le monde où les caï­mans copu­lent. Il reste donc le res­capé des for­fan­te­ries qui sévissent, il est vrai, très loin de chez loin car il ne ger­ma­no­pra­tine jamais. Sa bien­séance ou son auto pré­ser­va­tion lui évitent de par­ler à la troi­sième per­sonne fût-elle l’esprit saint. Preuve que le sien est sain in copore du même tabac.
A sa manière, c’est un esthète de l’art et du cochon. Qui s’en dédie n’est pas digne de lire ses livres : ceux qu’il écrit et ceux qu’il édite. Poète et plas­ti­cien, le Namu­rien n’a rien d’un lému­rien. Il vit dans la région de Char­le­roi. Ce ger­ma­niste de for­ma­tion, est un pas­sionné des langues plus étranges que sim­ple­ment étran­gères : per­san, alba­nais, serbo-croate,… il a publié entre autres Rouge Palpé à l’Atelier de l’Agneau mais il n’est pas de ceux dont les publi­ca­tions sur­chargent les rayons des libraires.
Il s’occupe aussi des édi­tions Cor­mor en Nup­tial dont le titre lui-même est tout un pro­gramme. Pour preuve, sa der­nière pro­duc­tion : Oaris­tys et autres textes de Rémy Dis­dero, poète qui fait le Jacques sans être fataliste.

 Entretien :

Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Un bon coup de coude.

Que sont deve­nus vos rêves d’enfant ?
Des cir­cons­tances aggravantes.

A quoi avez-vous renoncé ?
À l’éloquence, à l’équilibre.

D’où venez-vous ?
J’y revien­drai plus tard.

Qu’avez-vous reçu en dot ?
Le tendre et le tranché.

Un petit plai­sir — quo­ti­dien ou non ?
Le plai­sir de ne pas m’ébruiter.

Qu’est-ce qui vous dis­tingue des autres écri­vains et artistes ?
Le naturel/spontané. L’inviolabilité. Le dés­in­té­res­se­ment. L’insularité.

Com­ment définiriez-vous votre tra­vail d’éditeur ?
Tout com­mence par la posi­tion du missionnaire.

Quelle est la pre­mière image qui vous inter­pella ?
L’image fron­tale du cadavre de Ceausescu.

Et votre pre­mière lec­ture ?
LAVAMAT.

Quelles musiques écoutez-vous ?
Celles qui puisent à l’intérieur de l’être. Les vivantes, les intui­tives, les dérou­tantes. Pour l’instant: “Ibi­poi” (Kago)

Quel est le livre que vous aimez relire ?
“Haut piffre”.

Quel film vous fait pleu­rer ?
Joker (pas le film).

Quand vous vous regar­dez dans un miroir qui voyez-vous ?
Un rescapé.

A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
À la troi­sième personne.

Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
La porte dérobée.

Quels sont les artistes et écri­vains dont vous vous sen­tez le plus proche ?
Ah, cette manie des réfé­rences, ou de la parenté. Merde !

Qu’aimeriez-vous rece­voir pour votre anni­ver­saire ?
La carte géo­gra­phique d’un pays ima­gi­naire ou un dic­tion­naire de mots “racés” ou encore un cœur en caillou.

Que défendez-vous ?
Le rejet de la médiocrité.

Que vous ins­pire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est don­ner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
Atchoum.

Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la ques­tion ?“
Sans façon.

Quelle ques­tion ai-je oublié de vous poser ?
Com­ment allez-vous ?

Pré­sen­ta­tion et entre­tien réa­lisé par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com, le 2 octobre 2018.

1 Comment

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One Response to Celui qui a renoncé à l’éloquence et à l’équilibre : entretien avec Gaël Pietquin

  1. Villeneuve

    Suc­cinct mais bien tran­ché voici Piet­quin le malin .

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