Antoine Bello possède un goût prononcé pour les falsifications et ceux qui les fomentent. Pour preuve, un de ses livres se nomme Les falsificateurs. Son nouveau livre pourrait bien s’intituler « Les falsificateurs II » ( ou « Le retour »). L’auteur y déplie six versions d’un même cas. Ces cas d’un cas écrit par un psychiatre dont le nom est tout un programme : Le Verrier, dont on ne saura pas s’il porte des costumes à carreaux.
Quoique peu sympathique, il oblige le lecteur à se poser deux questions : savoir qui est écrit et qui écrit. Si bien que la phrase d’un des auteurs phares du romancier (Borges) « La certitude que tout est écrit nous annule ou fait de nous des fantômes. » pourrait être un bel incipit à cette fiction.
Brillant par ses connaissances compilées sur la psychanalyse, l’auteur — via son praticien– crée une mise en abyme et bien des leurres au leurre. C’est souvent drôle – ne serait-ce que par l’économie du livre. C’est parfois un peu lourd tant son narrateur est autant mauvais parleur que praticien plus soucieux de ses émoluments que de ses cures.
Reste qu’Antoine Bello demeure un cas dans le roman français. Il ose ce à quoi peu se risquent. D’une idée et dans chaque roman, il tire méticuleusement de prodigieux et dérisoires prémices toutes les conséquences. Trop peut-être.
jean-paul gavard-perret
Antoine Bello, Scherbius (et moi), Gallimard, coll. Blanche, Paris, 2018.