Stéphane Mosès, Instantanés suivi de Lettres à Maurice Rieuneau (1954–1960)

La pen­sée et la grâce

Stephane Mosès est de ces pen­seurs libres dont la pen­sée fut d’abord et pour lui une renais­sance au nom de fon­da­men­taux d’une exi­gence majeure. Elle le fit sor­tir d’un clair-obscur de la pen­sée et de “l’assimilation” vers une lumière pro­gres­sive qu’il sut modu­ler. Car, en dépit de son exi­gence et de ses rôles impor­tants dans les études et le monde  judaïques tant en France qu’en Israël, Mosès ne fut jamais sec­taire ou rigide. Et selon divers témoi­gnages, une dou­ceur éma­nait de sa per­son­na­lité.
Insis­tant sur le lien qui lie le judaïsme à la civi­li­sa­tion occi­den­tale, l’auteur à tra­vers ses recherches a per­mis de faire décou­vrir ou d’approfondir des pen­seurs tels que Gers­hom Scho­lem , Wal­ter Ben­ja­min, Mar­tin Buber, Her­mann Cohen, Manès Sper­ber, Hans Jonas mais aussi Maha­ral de Prague et Haïm de Voloz­hyn. Sans oublier Franz Kafka et Paul Celan. Néan­moins, l’œuvre de Mosès reste au plus haut point empreinte de la pen­sée de Franz Rosenz­weig sur lequel il écrit un livre majeur,  Sys­tème et Révé­la­tion.

Les lettres à Rieu­neau per­mettent de com­prendre l’importance de ce maître qui lui per­mit d’affiner la nou­velle vision de l’histoire liée à l’idée d’une uto­pie mes­sia­nique. À la vision opti­miste d’une his­toire conçue comme une marche per­ma­nente vers l’accomplissement final de l’humanité, Mosès oppose l’idée d’une his­toire dis­con­ti­nue, dont les moments ne se laissent pas tota­li­ser. Sur les décombres de la rai­son his­to­rique l’auteur croit — à l’époque de ces lettres — que l’espérance peut reprendre d’un essor.
L’utopie d’un temps ouvert à l’irruption du nou­veau semble alors ouverte. Mais Mosès y met­tra bien des bémols vers la fin de sa vie. Ce livre « double » per­met tou­te­fois de don­ner une vision plus humaine de l’auteur. Prin­ci­pa­le­ment dans ses  Ins­tan­ta­nés. De telles vignettes prouvent que le phi­lo­sophe n’était pas seule­ment un ger­ma­niste d’exception et en rien un pois­son froid de la pensée.

jean-paul gavard-perret

Sté­phane Mosès, Ins­tan­ta­nés suivi de Lettres à Mau­rice Rieu­neau (1954–1960), pré­face d’Emmanuel Mosès, Gal­li­mard, coll. L’Infini, Paris, 2018. A paraître le 26 mai.

1 Comment

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One Response to Stéphane Mosès, Instantanés suivi de Lettres à Maurice Rieuneau (1954–1960)

  1. liliane Moses -Klapisch

    Merci pour votre belle réac­tion au tra­vail de Ste­phane Moses

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