David Khara, dans ce thriller, ô combien tonique !, joue sur la réunion, par hasard, de deux personnages qui n’ont rien en commun mais qui doivent faire cause commune face aux périls qui les menacent. Si le livre débute par une action débridée, faite de courses-poursuites, de fusillades, de bagarres de série B, très vite le propos s’étoffe et le récit se densifie. Le romancier installe des éléments complexes, des situations tortueuses dans deux histoires distinctes qui ne se télescopent que par malchance. Il imagine une intrigue superbement montée, menée avec maestria jusqu’à des conclusions ahurissantes et d’une grande beauté, faisant regretter qu’elles ne se produisent pas dans la réalité.
Pour ses héros, il dévoile peu à peu des personnalités qui ne sont pas aussi simples qu’elles semblent le paraître. L’un et l’autre portent des secrets majeurs, sont impliqués dans des parcours qui sont tout sauf de santé. Autour des deux protagonistes, il conçoit une galerie de personnages bien campés, aux caractères étudiés et étoffés.
Au moment où la jeune employée d’Air France rêve à ce qu’elle va faire, dans quelques minutes, lorsqu’elle pourra échapper au vacarme de l’aéroport Fort Worth de Dallas, elle voit arriver deux retardataires, deux personnes de méchante humeur qui s’accusent mutuellement d’être responsables de leur retard. Enzo Meazza et Janet Livingston-Pierce regardent le gros porteur qu’ils auraient dû prendre s’élever dans le ciel. Une énorme déflagration retentit et un réacteur atterrit dans le hall faisant nombre de morts et de blessés. Enzo fait partie de cette dernière catégorie. Alors qu’il est évacué vers une ambulance, Janet s’aperçoit que, par inadvertance, il est en possession de son passeport qu’elle avait posé sur la banquette. Elle le suit et, pour monter dans le véhicule sanitaire reprendre le document, déclare qu’elle est son épouse. Des reporters les filment en tant que rescapés.
Or, Enzo sort de prison où il vient de passer cinq ans, à risquer sa vie parmi des criminels endurcis. À sa sortie, l’agent du FBI Andrew Bryniarsky l’attendait pour lui rappeler qu’il a toujours l’œil sur lui et qu’il veut les informations sur le Griffon, ce mystérieux criminel en col blanc. Il est persuadé qu’Enzo le connaît et qu’il le couvre. Arrivé au centre hospitalier, Enzo souhaite savoir si c’est bien le vol Air France qui a explosé. Passant devant un poste de télévision, ils se voient, après des images de la catastrophe, apparaître sur l’écran. Enzo réagit et entraîne Janet. Ils sont en grand danger, un danger qui se manifeste très vite avec l’arrivée de tueurs qui les prennent en chasse. Commence, pour le couple, une course éperdue jusqu’à…
Une partie de l’intrigue s’appuie sur des faits réels tels qu’on peut aujourd’hui découvrir en France et en subir, très vite les conséquences. Le choix du titre ne doit, par contre, rien au hasard. S’il est à double sens, il définit bien une partie de l’intrigue. L’auteur fait de nombreuses références au cinéma, aux films d’action et aux séries télévisées. David Khara fait développer par ses protagonistes des opinions intéressantes sur l’injustice, sur le sort des individus face à des structures multinationales ou à des cabinets de juristes et à leur capacité de nuisance. Il donne, entre autres exemples, le cas de ces trente-trois mineurs de fond chiliens spoliés par leurs avocats.
Avec Atomes crochus, David Khara livre un magnifique thriller à l’intrigue riche, dense et fort bien construite, animée par une théorie de personnages attachants ou détestables.
serge perraud
David Khara, Atomes crochus (Inédit), J’Ai Lu n° 11606, coll. “Thriller”, octobre 2016, 384 p. — 7,80 €.