La peinture de Yeh Fang devient une zone de potentialité en gardant par les traces du dehors l’amorce d’un invisible. Elle se distingue de toutes les figures du tableau dont elle est pourtant l’apparence. Le travail plastique concourt à excepter l’évidence directe pour d’autres « figures » plus denses et expressives au sein d’une « choséité de la peinture » (Beckett) particulière, alchimique.
L’œuvre est de l’ordre de la célébration en état de guet. Nous sommes là dans la situation contradictoire d’avoir àffaire avec un monde et à son absence.
Les compositions sont à la fois fermées et ouvertes en un schème d’immanence, de dispersion et de concentration et aussi d’énergie constitutive. Chaque élément est inclus dans sa forme sans véritablement « la rencontrer ». Il existe l’approche d’un contact sensoriel mais aussi une séparation. Cela permet l’épanouissement d’un phénomène de pollinisation spirituelle.
Yeh Fang ne cherche pas le fantastique mais le vertige de la pure possibilité. L’esprit est donc toujours présent pour l’apparition d’un paradoxal jardin des délices loin de toute trivialité physique. La puissance de l’âme constitue le rapport entre le visible et l’impalpable. Le premier devient la présence du second. La peinture fait donc surgir des substances flexibles (fleurs) des concordances infinies et fugaces.
jean-paul gavard-perret
Yeh Fang, Vision of the void, Moca Sturio, Tapei , 18 juin –17 juillet 2016.