Serge Le Tendre & Guillaume Sorel, J’ai tué Abel

Une vision rare des consé­quences du pre­mier crime de l’humanité 

Hamor est le chef res­pecté d’un petit clan de ber­gers nomades. Il est res­pec­tueux des dogmes reli­gieux et prête obéis­sance à Yahvé. Pen­dant la céré­mo­nie du mariage de sa fille avec l’aîné d’une famille alliée, deux sol­dats viennent le cher­cher. Nébu­ned­zar, le grand roi, le convoque. Pen­dant le voyage, il fait part aux deux hommes de ses prin­cipes de vie, de son dieu, ce qui agace un des guer­riers égyp­tiens qui devient mena­çant. Arrivé devant le roi, qui a mis en place un culte de la per­son­na­lité avec hom­mage obli­ga­toire à sa sta­tue géante, celui-ci lui demande de le tuer. Mais Hamor a juré à Yahvé de res­pec­ter la vie, ce qui met Nébu­ned­zar hors de lui. Il lui confie alors une mis­sion : “…trou­ver au nom de quel prin­cipe suprême Yahvé m’a condamné à tra­ver­ser le temps sans qu’aucun homme ne puisse jamais me tuer.
Pour Hamor, une vie nou­velle débute. S’il vit dans le luxe, il est sans cesse confronté à la vio­lence de ce roi qui ne semble goû­ter que la vue du sang, n’apprécier que la mort qu’il répand pour le bra­ver, le pous­ser à renier sa pro­messe. Et puis, les évé­ne­ments se pré­ci­pitent et les révé­la­tions s’enchaînent …

Premier volet d’une série sur les assas­si­nats qui ont bou­le­versé leur époque, cet album est aty­pique. En effet, si les autres opus portent sur des faits et des contextes his­to­riques, le pré­sent volume met en scène un mythe. Tou­te­fois, si on se réfère aux trois reli­gions du Livre, il est le pre­mier assas­si­nat de l’humanité. La Bible ne consacre que quelques ver­sets seule­ment à cette affaire lais­sant l’imagination com­bler les trous lais­sés par le texte quant à la des­ti­née de Caïn. Et l’imagination de Serge Le Tendre n’est pas en reste.
Il peau­fine donc une his­toire sin­gu­lière s’appuyant cepen­dant sur des faits his­to­riques authen­tiques tels que la prise de Jéru­sa­lem par les Baby­lo­niens, quelques traits de la vie et de la per­son­na­lité de Nabu­cho­do­no­sor II qui fut, effec­ti­ve­ment, un conqué­rant insa­tiable. Depuis, la col­lec­tion s’est enri­chie avec, par exemple, Marat, John Len­non, Phi­lippe II de Macédoine.

Si le scé­na­rio se situe dans les hauts niveaux de qua­lité, que dire du gra­phisme ! Guillaume Sorel reste Guillaume Sorel, un illus­tra­teur hors pair, dif­fi­ci­le­ment éga­lable tant il a de cordes (talen­tueuses) à son arc pour mettre en scène et en images les scé­na­rii qu’on lui confie. Il excelle dans la concep­tion des per­son­nages, dans la créa­tion des décors et dans la mise en cou­leurs. Bref, un artiste com­plet qui offre des œuvres inou­bliables.
Si vous ne devez lire qu’une bande des­si­née cette année, c’est celle-ci qu’il faut choisir.

feuille­ter quelques planches

serge per­raud

Serge Le Tendre (scé­na­rio) & Guillaume Sorel (des­sin et cou­leur), J’ai tué Abel, Vents d’Ouest, sep­tembre 2015, 62 planches — 15,50 €.

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