Ramón Díaz-Eterovic, L’obscure mémoire des armes

Un polar chi­lien pantouflard

Un détec­tive privé soli­taire et mélan­co­lique dans une ville étouf­fante. Un crime en appa­rence banal. Une réa­lité tra­gique qui se dévoile peu à peu. La rou­tine, quoi. Alors bon, on est au Chili, donc il sera sûre­ment ques­tion de la dic­ta­ture, et des sombres agis­se­ments dans les cou­loirs de l’ESMA (1). Ah, non, ça c’est à Bue­nos Aires. Au Chili, c’est la Villa Gri­maldi (2). Soit… Un peu pré­vi­sible ? C’est un peu ça. Des exemples ? Très simple. Oh, quelqu’un découvre quelque chose de louche ! Il pré­vient notre détec­tive mais se garde bien de dire de quoi il retourne. Com­bien on parie qu’il va dis­pa­raître dans des cir­cons­tances mys­té­rieuses avant d’avoir pu faire part de ses décou­vertes fra­cas­santes ? Oh, un méchant est démas­qué ! Oui mais il reste 50 pages avant la fin. Un rebon­dis­se­ment est donc à prévoir.

Et puis on uti­lise aussi le théo­rème bien connu du per­son­nage inutile à la nar­ra­tion mais sur lequel on insiste un peu trop pour que sa pré­sence soit tota­le­ment for­tuite. Ce serait un méchant que ça m’étonnerait qu’à moi­tié. Le tout avec les ingré­dients habi­tuels du genre. Un héros vieillis­sant (étu­diant à l’époque du coup d’Etat). Un peu poète (on est au Chili). Des amis par­tout où il faut (police, presse, kiosque à jour­naux). Un chat phi­lo­sophe (le quota d’excentricité). Bref, tout est sur des rails bien paral­lèles, bien hui­lés, sur les­quels tout roule avec une flui­dité désar­mante. Rien à faire, cette nou­velle enquête du détec­tive Here­dia, déçoit.
Tiens, à pro­pos de dic­ta­ture chi­lienne, j’ai bien envie de revoir les films de Patri­cio Guzmán.

Mat­thias Jullien

1 — Escuela Super­ior de Mecá­nica de la Armada (école supé­rieure de méca­nique de la Marine). Bati­ment tris­te­ment célèbre pour avoir été pen­dant la dic­ta­ture argen­tine un centre de déten­tion et de tor­ture.
2 — Pareil, côté mais chilien.

   
 

Ramón Díaz-Eterovic, L’obscure mémoire des armes, tra­duit de l’espagnol (Chili) par Ber­tille Haus­berg, coll. “Biblio­thèque hispano-américaine”, Métai­lié, mars 2011, 279 p. — 19,00 €

 

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Filed under On jette !, Pôle noir / Thriller

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