Un thriller à l’efficacité glaçante !
Les étudiants de la section écriture créative ont investi, pour un séminaire, le Red Cliffs Lodge, un motel au bord du fleuve Colorado. Un homme arrive, le visage dissimulé par un casque de moto, et commence un massacre systématique avec un fusil à pompe. Jilian, une étudiante rendue sourde par les détonations, trouve refuge dans la chambre de Karen, leur conseillère d’orientation. Troy, à Miami, quitte l’appartement de Ruby qu’il vient d’assassiner puis de faire dissoudre le corps dans la baignoire. Donald, 59 ans, chef par intérim à Grand Junction, dans le Colorado, est alerté du massacre. Il fonce, en compagnie de Jason, un Navajo, et d’un autre véhicule de police vers le motel. Karen et Jilian, se sont réfugiees dans la salle de bains et sont à l’écoute des bruits du dehors. À l’extérieur, le tueur casqué continue froidement à tirer sur tout ce qui est à sa portée et qui n’est pas encore mort. Jilian, terrifiée, pense que le tueur est là pour elle.
Ce livre raconte l’histoire d’un massacre comme il en arrive tant aux Etats-Unis et le cheminement des principaux acteurs du drame pour en arriver là. Le cauchemar a une explication rationnelle. L’auteur la livre à petites touches à travers trois personnages : Karen, Troy et Donald dont on devine très vite qu’ils sont tous très impliqués dans la tragédie actuelle. Chacun se remémore les principales étapes qui les ont amenés à vivre la situation actuelle. L’auteur, pour cela livre les biographies de ses protagonistes, leurs itinéraires. Ces souvenirs s’entremêlent avec le présent, avec le drame qui tous vivent à un niveau ou à un autre. Fabrice Colin charge tous ses personnages d’un passé lourd à porter, de souvenirs douloureux qu’ils ont dû fuir. Personne n’est épargné. Les actions, les réflexions, les sentiments, les émotions des autres acteurs passent par ces trois narrateurs.
L’auteur livre son récit dans un style syncopé, avec des phrases courtes, un vocabulaire dynamique renforcé par l’utilisation du présent, même pour les retours, nombreux, dans le passé. Un passé qui pèse lourd. Donald n’a jamais admis l’effondrement de deux tours jumelles un 11 septembre, Troy est à jamais marqué par son enfance dans une secte, une enfance faite de mauvais traitements, de tortures. Karen pour sa part, regrette certains des actes qu’elle a dû accepter de faire. Petit à petit, le puzzle se reconstitue. Petit à petit, une logique et une cohérence apparaissent.
Avec Ta mort sera la mienne Fabrice Colin, dont on connaît le talent pour construire des intrigues d’une rare efficacité, ne déroge pas à sa réputation. Il offre un récit d’une actualité et d’une justesse remarquables.
serge perraud
Fabrice Colin, Ta mort sera la mienne, Le Livre de Poche n° 33910, décembre 2015, 384 p. – 7,30 €.