Celle qui a renoncé à renoncer : entretien avec Magdalena Lamri

Magda­lena Lamri crée un uni­vers qui passe d’un maso­chisme à un éro­tisme par­ti­cu­lier. La sug­ges­tion plus que l’évidence laisse ouverte la ques­tion de la fémi­nité. Un cer­tain inachevé (mais tou­jours impec­cable) à la fois exalte et révèle déri­soire l’image qui laisse le voyeur sue sa « faim » et son inas­sou­vis­se­ment. Tout tangue entre le plai­sir et le mys­tère. Des « macu­la­tions » sub­tiles (pré­sence ani­male par exemple) de nar­ra­tions amorcent l’attirance et la peur. Le regard se perd dans un uni­vers ouvert et refusé. Il porte dou­ble­ment le signe de l’offrande et de l’interdit. Le tout néan­moins sous le sceau d’un cer­tain plai­sir du jeu. Mais le désordre est cal­culé : l’image exclut l’explicite. Chaque scène en est le pré­lude ou la méta­phore. Toute une méca­nique dresse un doigt rose qui fait l’amour aux yeux. Chaque figure sug­gère l’improbable parce qu’elle pressent l’abominable abîme qu’il faut tou­jours combler.

Mag­da­nela Lamri,
– « Offline » Rofaida Zaid Gal­lery 26–30 mars 2014, Cité de la Mode et du Design Paris,
– « Muses », Rofaida Zaid Gal­lery, Mai 2014, Dubai. ,
– « OH MY GOD! » avril 2014 et artiste per­ma­nente, « Les Infir­mières Gale­rie », Bou­le­vard Beau­mar­chais, Paris 11ème.

Entre­tien :

Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
L’idée de rejoindre mon atelier.

Que sont deve­nus vos rêves d’enfant ?
Ils sont intacts. Je suis tou­jours une enfant.

A quoi avez-vous renoncé ?
J’ai renoncé à renon­cer depuis bien longtemps …

D’où venez-vous ?
D’où je viens ?… L’essentiel est plu­tôt où je vais.

Qu’avez-vous reçu en dot ?
De l’ironie.

Qu’avez vous dû “pla­quer” pour votre tra­vail ?
Mon tra­vail est ma vie. Je dors pein­ture, je mange pein­ture … J’ai cer­tai­ne­ment dû aban­don­ner cer­taines choses, elles ne devaient pas être essen­tielles car je ne m’en sou­viens plus.

Un petit plai­sir — quo­ti­dien ou non ?
Une coupe de cham­pagne … ou deux.

Qu’est-ce qui vous dis­tingue des autres artistes ?
Je crois être très sin­cè­re­ment comme tous les autres artistes… En per­pé­tuelle remise en ques­tion, pas­sion­née, ani­mée irra­tion­nel­le­ment par le besoin de créer.

Quelle fut l’image pre­mière qui esthé­ti­que­ment vous inter­pela ?
J’ai été bou­le­ver­sée par le retable d’Issenheim et son incroyable modernité !

Et votre pre­mière lec­ture ?
La pre­mière qui m’a mar­quée c’est « Alice au Pays des Mer­veilles » de Lewis Caroll et qui me pour­suit depuis mon enfance.

Com­ment pourriez-vous défi­nir votre tra­vail sur la re-présentation de la femme ?
La femme dans mon tra­vail est com­plexe et ambi­va­lente. Elle allie tous les para­doxes. Elle tente de sub­sis­ter dans un monde contem­po­rain en déclin et de redé­fi­nir ses dif­fé­rents posi­tion­ne­ments de mère, de maî­tresse, d’épouse, d’individu…

Quelles musiques écoutez-vous ?
J’écoute beau­coup de Jazz ( Col­trane, Fitz­ge­rald … ), pas mal de vieux rock des années 60–70 mais en ce moment c’est Agnès Obel et Soley qui résonnent conti­nuel­le­ment à l’atelier.

Quel est le livre que vous aimez relire ?
Il y en a plu­sieurs… J’aime replon­ger assez régu­liè­re­ment dans l’univers de Fitz­ge­rald, de H.G. Wells ou d’ André Breton …

Quel film vous fait pleu­rer ?
A peu près tous je crois, je suis une extra-sensible … Le der­nier en date « Ala­bama Mon­roe » de Felix Van Groe­nin­gen, un véri­table chef d’oeuvre!

Quand vous vous regar­dez dans un miroir qui voyez-vous ?
L’une des “Mag­da­lena” que je suis.

A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
Je n’ai jamais osé écrire aux per­sonnes que j’admire.

Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
Big Sur en Californie …

Quels sont les artistes dont vous vous sen­tez le plus proche ?
Je suis plus que sen­sible et admi­ra­tive du tra­vail d’Adrian Ghe­nie, de Jus­tin Mor­ti­mer, de Fabien Mérelle ou encore de Julien Salaud.…Je me sens très proche de leurs uni­vers res­pec­tifs. Je devrais peut-être leur écrire, non ?

Qu’aimeriez-vous rece­voir pour votre anni­ver­saire ?
Un vio­lon­celle, un rêve d’enfant.

Que défendez-vous ?
Le droit de rêver.

Que vous ins­pire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est don­ner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
Une ter­rible et exquise réalité.

Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la ques­tion ?”
Dans le doute, j’aurais dit “non”.

Quelle ques­tion ai-je oublié de vous poser ?
Vous auriez pu me deman­der si je suis plu­tôt viande ou pois­son. Mais j’avoue que je ne vous aurais pas répondu, cette ques­tion étant trop personnelle …

Pré­sen­ta­tion et entre­tien réa­li­sés par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com, le 1er mai 2014.

 

1 Comment

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One Response to Celle qui a renoncé à renoncer : entretien avec Magdalena Lamri

  1. POUGATCH

    Mag­da­lena,
    j’ai eu le plai­sir de vous connaître puis de vous expo­ser à la Gale­rieLe 5 Opéra puis à la Cité de la Mode et du Design en atten­dant Miami et je tiens à vous dire que j’aime de plus en plus votre travail,la der­nière pein­ture que m’a mon­trée Rofaïda est superbe
    A très vite et en atten­dant Joyeux Noël
    Jean-Alexis Pougatch

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