Ce projet photographique met en exergue une forme de journal intime mais dénué du « moi » de la créatrice. Bref, son « moi est haïssable » mais de fait elle l’habite et crée le monde qu’elle regarde.
Dans chaque photo du livre, le regardeur peut inventer le puzzle d’une femme en une forme de simplicité par la sophistication. Demeure un mystère urbain là où le sujet du sujet est absent puisque le « comme » ne donne que des indications.
La voyageuse commença par un travail sur les autels domestiques à Palerme. Ici, à l’inverse, se dévoilent des lieux dont les éléments constituent une sorte de labyrinthe du regard et permettent de questionner le rapport aux images et à l’œil lui-même.
Emma Grosbois semble s’y perdre mais règne en maîtresse. Le dogme quasi chrétien de la Révélation passe par des effets parfois alambiqués, parfois plus subtils de décors, surfaces et volumes.
L’artiste se met à leur service là où les scénographies paraissent moins des artifices que des artefacts. Les photographies présentent des mises en abyme, où la limite entre le vu et la regardante, entre objet et sujet, devient une interrogation.
Le style est reconnaissable parmi tous : cadrage, couleurs jamais trop vives offrent un regard différent d’une telle femme en quête d’elle-même. L’appareil photographique aime ce qu’il voit et le regardeur entre dans ce jeu de respect, d’inspection et de son double : l’introspection.
jean-paul gavard-perret
Emma Grosbois, Comme, Co-production Zoême, Marseille, et Filigranes éditions, Paris, 2024, 88 p.- 23,00 €.