Il est urgent… mais pour qui ?
Toby, journaliste au Queenstown Journal, est informé de la réunion d’un petit groupe d’hommes parmi les plus puissants de la Terre. Ils sont là pour établir des scénarii afin de sauver “l’élite” quand arrivera l’effondrement.
Près de Paris, François Dampierre, le PDG du plus grand groupe automobile français, se rend à la Résidence où il a acquis un appartement… quelques 70 mètres sous terre. Il est intégré dans un bunker où tout est conçu pour vivre en autarcie plusieurs années. Un bruit l’alerte mais il tombe, son whisky préféré a été drogué. Quand il reprend conscience il est entravé et un individu lui grave au cutter, un message dans le dos avant de l’asphyxier.
Le commandant Ronan Sénéchal doit quitter la chambre où son épouse se repose après avoir donné naissance à un garçon. Son adjoint le presse de venir car il n’a jamais rien vu de pareil.
Dans la banlieue lyonnaise, un pêcheur ramène une main. La capitaine Irina Kowalski retrouve son adjoint, le lieutenant Roche, devant le corps que des plongeurs ont récupéré. Le mort a été torturé, aucune partie du corps n’a été épargnée. Un technicien reconnaît un jeune youtubeur spécialisé dans le survivalisme et l’écologie.
Les services de Ronan identifient un ADN, celui du youtubeur. Or, celui-ci a été assassiné bien avant Dampierre. Les deux équipes de policiers vont devoir coopérer et plonger dans l’univers sulfureux des activistes pour qui le changement climatique est une aubaine…
Ce roman est paru en grand format aux Éditions Liana Levi en 2022 sous le titre Le grand effondrement. La présente édition en poche porte le titre Minuit moins une, un titre qui semble plus approprié au contenu et aux grands thèmes qui le traversent. En effet, le romancier aborde, selon différents angles, cette fin de l’humanité illustrée par cette horloge qui marque les dernières secondes avant l’embrassement final.
Parallèlement, il traite du survivalisme, cette manière de vivre en totale autonomie dans un milieu naturel, même très hostile. C’est aussi la recherche d’une vie plus proche de la nature, détachée de cette société trop technologique. Il pointe cependant, avec un humour féroce, cette tendance qui se répand : “… un pur produit d’aujourd’hui, qui dit détester la société moderne mais qui ne se sépare jamais de son smartphone.”
Il structure une intrigue où les plus riche cherchent à se protéger des calamités toutes proches selon les chantres du catastrophisme mais qui en profitent pour proposer des solutions qui leur permettent de se gaver, qui tolèrent des débordements insupportables comme des événements sportifs dans des lieux absolument contestables, écologiquement parlant.
Sébastien Le Jean met en scène deux enquêtes menées par deux groupes de policiers qui connaissent des difficultés personnelles. De plus en plus, les enquêteurs s’humanisent, connaissent des failles, des épuisements. La mode n’est plus à ces détectives manichéens que rien ne rebutait, faisant le coup de poing à l’envi en consommant force boissons fortes.
Mais ces enquêtes restent difficiles, dangereuses car elles débouchent sur des organisations prêtes à tout pour atteindre leurs buts. L’auteur introduit dans son récit Viktor Kieffer, l’auteur d’un essai, Se préparer à l’effondrement, qui suscite nombre de vocations pour le meilleur mais surtout pour le pire. Il évoque aussi, pour illustrer cela, la théorie de la dinde inductiviste.
Sébastien Le Jean signe un premier roman, un thriller efficace, en tension, s’appuyant sur une actualité plus que brûlante jusqu’à un final en apothéose.
serge perraud
Sébastien Le Jean, Minuit moins une, Folio policier n° 986, avril 2023, 466 p. — 9,70 €.