Les habitants des mers se rebellent
Ce dossier édifiant a d’abord pris la forme d’une pièce de théâtre écrite par Julia Duchaussoy. Elle l’a présentée en 2022 au festival d’Avignon, puis au théâtre du Lucernaire à Paris. Avec la complicité de Sébastien Salingue, elle l’a adapté en bande dessinée, album édité par Marabulles.
Les auteurs explicitent le monde maritime, son importante pour la planète et pour l’Humanité. Ils le font présenter par quelques spécimens issus des espèces les plus marquantes, les plus représentatives, les plus connues.
Quand on s’interroge sur les origines de la vie, la majorité des humains lèvent les yeux vers les galaxies, mais ne regardent pas, sur la planète Terre, les 70 % de surface recouverte par les océans. Pourtant, ce sont ces océans qui génèrent l’atmosphère, évitent que tout soit brûlé par le soleil et qui sont la source de la vie.
Puis un picoplancton, une algue microscopique explique que l’humanité est au sommet d’un Himalaya de bêtise et donne des chiffres ahurissants quant aux forages, aux millions de tonnes de déchets. Parce qu’il se fâche face à cette situation, deux dauphins jouant les maîtres de cérémonie, le remplacent par le phytoplancton, une jolie algue qui explique son rôle dans la photosynthèse. Elle absorbe le dioxyde de carbone et relâche de l’oxygène. Elle fait remarquer qu’on ne parle que du poumon vert qu’est l’Amazonie, mais qu’elle et ses sœurs fournissent entre 60 et 70 % de l’oxygène indispensable à la vie.
Et c’est au tour du corail, de l’anémone, du poulpe… Chacun détaille son rôle et les problèmes auquel il se confronte. C’est aussi un exposé sur les différentes façons de se reproduire dans cet univers, entre les espèces totalement autonomes, celles qui ont besoin de se faire féconder et celles qui usent de contacts plus ou moins étranges mais… efficaces.
Une large partie est consacrée à la pêche par les hommes, explicitant l’évolution des navires jusqu’à ces monstres qui détruisent tout l’écosystème sur leur passage. Sont évoqués le gaspillage les déchets, les rejets.
Quelques pages racontent le triste sort des animaux en captivité dans un des premiers delphinariums avec la vie de Tilikum, un orque. Les exposés, les données sont scientifiques mais le propos est présenté avec humour et le ton est enlevé. C’est ludique, très loin d’être ennuyeux.
Les deux auteurs connaissent leur sujet. Julia Duchaussoy est une plongeuse passionnée, instructrice de plongée sous-marine et chef opératrice hyperbare. Sébastien Salingue possède le brevet d’État de plongée qualifié handisport. Il est apnéiste et guide de croisière.
Le dessin et la mise en couleurs sont l’œuvre de Sébastien Salingue. Il présente tous les intervenants avec une belle réussite, donnant des visages humains ou humanoïdes à ces différentes espèces. Les schémas explicatifs, sont très parlants, faciles à lire et fort bien présentés. La couleur n’est pas essentielle mais les rehauts de quelques touches donnent un bel effet.
Cet ouvrage passionnant, didactique, où les informations, les données sont présentées de façon divertissante, a tout pour plaire pour une approche de cet univers fondamental pour l’Humanité car, comme il est rappelé dans l’introduction, il n’y a pas de planète B !!!
serge perraud
Julia Duchaussoy (scénario d’après sa pièce de théâtre) & Sébastien Salingue (scénario, dessin et couleur), Le monde du silence gueule ! Marabulles, avril 2023, 128 p. — 19,95 €.