Roman d’apprentissage par excellence
L’armée du daimyo, le roi-dragon, attend, immobile, l’ordre de fondre sur la forteresse sous le regard impassible de Toshirô, le seigneur des lieux, son vassal. Une première attaque ouvre la citadelle aux assaillants. Daimyo suspend l’assaut pour faire porter une proposition de mariage à dame Kachiko, l’épouse de Toshirô. La réponse : ” Plutôt subir mille morts que vivre aux côtés d’un porc.” déclenche la fureur du roi, les massacres, le saccage. Mais, parallèlement, un groupe de guerriers reçoit l’ordre de ramener vivante Kachiko. Tout cela se déroule sous le regard impassible de Toshirô. Il est mort, sa tête fichée sur une pique est orientée vers les combats.
Hatanaka, un ex-samouraï, forme le jeune Ichirô au maniement du Katana. Quinze ans ont passé depuis qu’il s’est enfui de la forteresse emportant l’enfant de Toshirô et Kachiko avec pour mission de l’élever. Il estime que le moment est venu de dévoiler la vérité au jeune homme. Celui-ci, bouleversé, veut venger ses parents et tuer le roi-dragon. Il commence alors sa quête, en compagnie de son mentor, recueille Buta, un jeune paysan rejeté par les gens de son village pour couardise et se présente au château du daimyo. Un recrutement de samouraï est en cours. Ichirô se présente, mais les épreuves, dont les règles changent pendant la sélection, lui sont fatales. Il est laissé pour mort dans un charnier.
Katana, du nom de cette arme blanche redoutablement efficace, est un roman qui mêle action, aventure, fantasy, fantastique selon des codes du manga. Jean-Luc Bizien plonge les racines de son récit dans un Japon médiéval où la tradition des combattants solitaires a fait fureur. Il privilégie l’action, les combats, explicitant les techniques, les procédures et les usages en la matière. Il multiplie les rebondissements et les retournements de situation. Peu à peu, au fil de l’histoire, il étoffe l’équipe de nouveaux personnages dont les caractères et les profils psychologiques complètent heureusement le duo initial.
Roman pour jeunes adultes, il contient un certain nombre de messages à usage d’apprentissage. L’un concerne la maîtrise de soi, la nécessaire réflexion avant l’action, avant toute prise de décision. Chaque combat est une concentration, une étude de l’adversaire, de ses moyens et de ses possibles réactions. L’auteur réussit, à merveille, à rendre cette tension, cette attente qui précèdent les quelques secondes décisives où se jouent la victoire ou la défaite.
Un autre est relatif au jugement prudent qu’il faut porter sur ses contemporains, éviter le mépris pour découvrir la véritable personnalité. La plupart possède des compétences, des dispositions qui restent parfois bien cachées quand elles n’ont pas trouvées à se révéler.
Avec le thème assez classique de la quête de vengeance et du parcours initiatique vers l’âge adulte (mais, qu’est-ce qu’un adulte ?), Jean-Luc Bizien offre un récit très agréable à parcourir. Il fait ressentir l’ambiance des combats, propose suffisamment de rebondissements pour concocter une intrigue en tension. Le coup de théâtre final donne une furieuse envie de pousser l’auteur à livrer la suite le plus vite possible.
serge perraud
Jean-Luc Bizien, Katana, tome 1 : « Vent rouge », Editions le pré aux clercs, coll. Pandore. Mai 2013, 336 p. — 16,00 €.