La fin de 86 ans d’aventures ?
Cet album marque les cent ans d’édition de la société Dupuis, commencé le 2 avril 1922 avec un hebdomadaire destiné à un public féminin : Les Bonnes Soirées.
Pour cette nouvelle aventure du couple emblématique de l’entreprise, l’éditeur souhaite constituer une équipe nouvelle avec de jeunes auteurs. Il confie donc le scénario à Sophie Guerrive et Benjamin Abitan et le dessin à un illustrateur qui connaît déjà les héros ayant travaillé, entre autres, sur un texte de Yann.
Ceux-ci ont souhaité retrouvé l’esprit de la grande période des héros, quand ils aventuraient sous la férule d’André Franquin entre Repère de la murène et Spirou et les hommes-bulles. Celui-ci s’accordait une liberté totale, tant pour les personnages, pour les inventions que pour les gags. Le tout était traité avec un sentiment d’évidence, de simplicité et des actions toniques.
Le directeur des Éditions Dupuis est passablement énervé. Il faut absolument retrouver Spirou et Fantasio pour fêter les 100 ans de la société. Ceux-ci, quelques jours avant, campaient non loin de Champignac-en-Cambrousse. Ils se préparent à rentrer pour le centenaire. Après quelques soucis avec une tente bien spéciale, dans la voiture conduite par Fantasio, Spirou fait la lecture de la presse sur une tablette. Ils s’étonnent du contenu dithyrambique de l’article de Seccotine sur Korallion. Le duo a connu cette ville secrète de Zorglub, sous la mer. Elle a été reprise pour devenir une destination à la mode, non plus ouverte qu’aux milliardaires mais aux touristes ordinaires.
Passant vers le comte de Champignac, celui-ci leur fait part d’une nouvelle découverte et d’une inquiétude quant à une espèce marine invasive. Ils décident de se rendre à Korallion pour comprendre cet intérêt soudain. Ils sont accueillis par madame D’Oups, la présidente, qui leur expose le nouveau concept.
Mais la façade est trop belle et très vite les deux héros, traités comme des VIP, vont devoir faire preuve de réactivité pour échapper au sort qui les attend…
Dans ce récit, qui fait une sorte de suite à Spirou et les hommes-bulles, les scénaristes multiplient l’usage des nouvelles technologies faisant quitter aux héros les années antérieures à l’an 2000. L’intrigue, d’ailleurs, s’appuie sur ces capacités nouvelles offertes par des technologies d’avant-garde. Ils proposent un dénouement dramatique mais intéressant faisant une belle place à une représentante du sexe féminin.
Le traitement graphique se partage entre Olivier Schwartz pour le dessin et Alex Doucet pour la mise en couleurs. Le premier assure le dessin semi –réaliste cher à l’école de Marcinelle. Il assure un certain dynamisme et n’écrase pas les courbes naturelles des dames qui traversent le récit. La mise en page est variée jouant avec toutes les possibilités offertes. Alex Doucet retrouve les couleurs emblématiques et signe un superbe travail.
Bien que cet album s’adresse au premier lectorat de Spirou, à savoir les enfants, les grands enfants trouveront matière à se régaler à suivre les vicissitudes des héros.
serge perraud
Sophie Guerrive (scénario), Benjamin Abitan (scénario), Olivier Schwartz (dessin) & Alex Doucet (couleur), Les aventures de Spirou et Fantasio — t.56 : La mort de Spirou, Dupuis, août 2022, 64 p. — 11,90 €.