Le décor de fantasy médiévale retenu par le scénariste lui permet d’aborder différents thèmes qui obèrent l’existence d’humains. Avec Islen, cette jeune fille qui a hérité des pouvoirs de sa mère, une créature mythique, c’est le poids des transmissions de gènes. Toutes ne sont pas aussi spectaculaires, mais elles peuvent gâcher une existence par des carences, des prédispositions à des affections.
L’Amour occupe une belle place dans ce second tome. Celui-ci peut-il être possible entre des individus de conditions différentes ? Peut-il exister des sentiments forts quand on se sait exclue pour une raison physique ? Hubert offre un joli raccourci sur l’avancée en âge des enfants et le vieillissement de ceux qui les élèvent.
Le scénariste intègre une belle modernité dans son récit où il traite aussi des relations familiales difficiles, du féminisme, de la différence…
Islen est une princesse qui a hérité des terribles pouvoirs de sa mère. Elle les considère comme une malédiction. De plus, physiquement, elle possède un attribut peu humain qui renforce sa volonté d’isolement. Dans un geste de légitime défense elle déclenche une catastrophe qui cause la mort du prince héritier.
Elle est partie avec Arzhur, ce chevalier déchu, alors que le roi, son père, décrète qu’il faut la retrouver pour la réduire à néant. Les fuyards trouvent refuge dans la forêt et au campement, près d’un feu de bois, il se fait entreprenant. Elle refuse tout net, ne voulant pas entendre parler d’amour. Il a détruit sa mère. Elle-même en a fait la douloureuse expérience. C’est la cause de son exil dans le château noir.
Mais l’amour reste le maître du jeu. Il faut trouver un refuge pour l’hiver. Arzhur se décide à retourner chez lui, le royaume dont il a été banni pour une faute impardonnable… Et les trois harpies ne semblent pas vouloir s’avouer vaincues…
Très vite l’atmosphère se teinte de tragique. Il faut affronter un passé, se défendre d’accusations, lutter contre des partis pris. Le scénario intègre ces éléments sans négliger l’action, le fantastique, la manipulation tant physique que psychique.
C’est fort, c’est dense, c’est dynamique.
La mise en images se partage entre Vincent Mallié et Bruno Tatti. Le style de dessin du premier se prête fort bien à ce type de récit avec ce trait réaliste, la manière de donner corps et vie aux personnages. La couleur délicate apporte une dimension supplémentaire aux protagonistes, aux décors et avive les sentiments exprimés, que ceux-ci soient de belle nature ou néfastes, voire funestes.
Un second tome qui clôt de belle manière une histoire riche en sujets abordés, servi par un graphisme qui régale le regard.
serge perraud
Hubert (scénario), Vincent Mallié (dessin) & Bruno Tatti (couleurs), Ténébreuse — Livre second, Dupuis, coll. “Aire Libre”, septembre 2022, 80 p. — 20,95 €.