François Médéline, Les larmes du Reich

Les secrets de la guerre…

Après La sacri­fiée du Ver­cors (10/18 n° 5748), Fran­çois Médé­line conti­nue d’explorer cette période qui suit la Seconde Guerre mon­diale où les trau­ma­tismes de toutes natures per­sistent après ces évé­ne­ments dra­ma­tiques.
Avec l’inspecteur Michel, il remonte, entre autres, la piste de ces enfants juifs cachés pour les sous­traire au plan d’extermination, des enfants qui se sont retrou­vés iso­lés, orphe­lins, dont les parents sur­vi­vants n’ont pu retrou­ver les traces, voire des parents adop­tifs qui ont refusé de les rendre.

C’est le 21 mars 1951 que l’inspecteur Michel, de la bri­gade cri­mi­nelle de Lyon, arrive à vélo à Crest où un couple a été assas­siné. Henri et Louise Del­homme ont été tués avec un fusil de chasse et Juliette, leur fillette de onze ans, a dis­paru. La tue­rie remonte à trois semaines.
Il voit Marc Escof­fier, un gar­çon de ferme, et Nata­cha, une Russe qu’il a ren­con­trée en Alle­magne quand il était en STO. Ils étaient proches des Delhomme.

L’inspecteur fouille, retourne, cherche, mais ne trouve aucune trace, pas de papiers, pas de docu­ments admi­nis­tra­tifs. Ils étaient très dis­crets et Henri fai­sait l’école à Juliette. C’est à la gen­dar­me­rie que Michel trouve une nou­velle indi­ca­tion. Les Del­homme avaient deux fermes. La seconde est en ruine mais, sur les lieux, il découvre une sorte de cachot avec le mot Elsa gravé sur une cloison.

C’est Marc qui raconte que, lorsque la sœur d’Henri est venue, il y a quelques temps, la ren­contre s’était très mal pas­sée. Et il décrit une femme jolie, la tren­taine, habillée en cita­dine avec talons. C’est dans le dos­sier des gen­darmes qu’il dégote l’adresse de cette sœur, venue recon­naître les corps.
Or quand il la voit, c’est une dame proche de la soixan­taine et qui n’a rien d’une cita­dine. Mais que cherche vrai­ment Michel ?

L’intrigue est si tra­vaillée qu’il est dif­fi­cile d’en dévoi­ler plus au risque de spoi­ler. Cepen­dant, le roman­cier sème nombre d’indices ténus tout au long de son récit, des indi­ca­tions qui n’attirent pas spé­cia­le­ment l’attention où qui n’apparaissent pas dans leur contexte.
Il détaille les recherches menées par le poli­cier, raconte les lieux qu’il visite et donne mille indi­ca­tions sur l’atmosphère qui régnait à l’époque. De Lyon, à Crest, de Gre­noble à Paris, du Havre en Alle­magne nazie, il pré­cise le par­cours des protagonistes.

L’auteur conçoit une intrigue qui plonge ses racines dans les années 1930, quand une jeune femme décide de vivre sa vie, aban­don­nant la mai­son de sa mère. Il croise son par­cours avec des évé­ne­ments de guerre et cette volonté des tenants du Reich d’exterminer un cer­tain nombre de popu­la­tions.
Il fait état des Son­der­bau­ten, ces lieux de pros­ti­tu­tions créés dans des camps de concen­tra­tion où des femmes, essen­tiel­le­ment des condam­nées de droit com­mun, étaient offertes aux pri­son­niers consi­dé­rés comme méri­tants, comme des Kapos, et aux SS. Le sujet reste lar­ge­ment tabou dans les études sur le nazisme jusque dans les années 1990.

Ce roman se par­tage en vingt cha­pitres dont le titre est extrait d’une chan­son. Fran­çois Médé­line en donne, en fin de volume, les réfé­rences avec l’interprète et les auteurs.
Un roman où l’intrigue, menée de main de maître, est servi par une belle rigueur historique.

serge per­raud

Fran­çois Médé­line, Les larmes du Reich, Édi­tions 10/18 coll. “Polar”, avril 2022, 198 p. – 14,90 €.

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Filed under Pôle noir / Thriller

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