Fred Duval, Michel Bussi & Noé Monin, Cinq Avril — t.01 : “L’héritier de Da Vinci”

Cape, épée et Humanisme…

Le 5 avril 1514, un nouveau-né, qui porte un magni­fique col­lier, est déposé devant le Clos Lucé. Les ser­vantes de Mar­gue­rite d’Angoulême le recueillent. Marie, une cui­si­nière du châ­teau, l’appelle Cinq Avril. En 1516, Léo­nard de Vinci, invité par le roi Fran­çois Ier, s’installe au Clos Lucé ou il ren­contre ce petit gar­çon. Il décide de lui dis­pen­ser une édu­ca­tion et lui confie, peu de temps avant sa mort, qu’il ne l’a pas choisi par hasard pour lui faire par­ta­ger ses secrets. Il en saura plus le jour de ses dix-huit ans.

Avril va fré­quen­ter assi­du­ment la pièce secrète de Léo­nard et apprendre tous les secrets que le maître n’a pas livrés à ses dis­ciples. Mais Avril reste obsédé par l’identité de sa mère. Et le jour de ses dix-huit ans arrive. Marie lui remet le col­lier qu’il avait en arri­vant, qu’il avait égaré tant de fois, et l’abbé un docu­ment que Léo­nard avait pré­paré pour cet anni­ver­saire.
Mais l’inquisition, en la per­sonne du car­di­nal Sordi, arrive bien décidé à net­toyer ce foyer qui sent le soufre, à détruire ces enne­mis du Dogme, par­ti­cu­liè­re­ment l’héritier de Da Vinci…

Avec Michel Bussi et Fred Duval au scé­na­rio, il fal­lait s’attendre à un récit décoif­fant, d’une grande richesse tant docu­men­taire que nar­ra­tive. Et, on n’est pas déçu. Pre­nant pour base une oppo­si­tion entre l’ouverture d’esprit, le savoir, la curio­sité scien­ti­fique et le res­pect incon­di­tion­nel de dogmes ineptes, ils mettent en scène une suite de rebon­dis­se­ments tous plus attrac­tifs les uns que les autres.
Dans cet album, ils concentrent leur récit autour de la Bre­tagne et sa volonté de res­ter indé­pen­dante, de ne pas être inté­grée au royaume de France. Ils font appel à des per­son­nages his­to­riques authen­tiques, à des évé­ne­ments réels comme ce traité du Ver­ger qui, à l’issue de la bataille de Saint-Aubin-du-Cormier, impose à la duchesse Anne, alors âgée de onze ans, de ne pas se marier sans le consen­te­ment du roi de France. Michelle de Sau­bonne, dite la Femina Cor­da­tis­sima, des Huma­nistes comme Guillaume Budé, Eras­mus et Tho­mas Moore par­ti­cipent à l’intrigue.
Est-ce aussi un petit clin d’œil à Cinq-Mars, en espé­rant que le héros ne subisse pas le même sort ?

Le trait effi­cace de Noé Monin, oscil­lant entre réa­lisme et cari­ca­ture, per­met d’imager tout le dyna­misme du récit. Les séquences où le héros est moins bous­culé sont bien attrac­tives par les révé­la­tions qu’il reçoit. Le tra­vail sur les décors donne un résul­tat très posi­tif, posi­tion­nant par­fai­te­ment les actions.
Les cou­leurs de Sedyas concourent à rendre les planches agréables à regar­der et amènent à reve­nir pour en mieux appré­cier la beauté.

Les scé­na­ristes réus­sissent la gageure de conju­guer un récit de cape et d’épée (c’est la pleine période), des pour­suites, des traî­trises, des com­plots, de mettre la Bre­tagne au cœur de l’intrigue et de faire par­ti­ci­per des per­son­nages d’une impor­tance capi­tale pour l’humanisme.
Remarquable !

serge per­raud

Fred Duval et Michel Bussi (scé­na­rio), Noé Monin (des­sin), Sedyas (cou­leurs), Cinq Avril — t.01 : L’héritier de Da Vinci, Dupuis, mai 2022, 64 p. — 12,50 €.

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