Jérôme Camut & Nathalie Hug, Nos âmes au diable

Un thril­ler bouleversant 

Ces der­nières années, de nom­breux crimes ignobles ont impli­qué des enfants et des ado­les­cents. On doit se deman­der com­ment les proches trouvent la force de conti­nuer à vivre, et pour cer­tains de par­don­ner aux assas­sins. Outre les proches, nombre de per­sonnes dif­fé­rentes sont impli­qués dans ces affaires.
Ce sont d’abord les vic­times quand elles en réchappent, les amis des parents, des enfants ou ado­les­cents, les enquê­teurs, les familles des assassins…

Sixtine, une fillette de dix ans, est en vacances avec son père, chez ses grands-parents sur l’île d’Oléron. Elle est fière d’avoir vaincu sa peur en s’introduisant, seule, dans un vieux bun­ker. Elle est si heu­reuse qu’elle veut racon­ter son exploit à ce gen­til mon­sieur tout près. Quelques heures plus tard, alors que Jeanne, sa mère, est en réunion avec Ber­nie et quelques autres pour plan­cher sur une cam­pagne publi­ci­taire, elle reçoit l’appel de Richard, son époux: « Six­tine a dis­paru. »
Elle sombre dans l’horreur. Les heures passent dans l’attente fié­vreuse d’un signe du ou des ravis­seurs, des heures tra­ver­sées de pen­sées toutes plus hor­ribles les unes que les autres. C’est l’effondrement d’une bos­seuse qui se mar­ty­rise en se pen­sant mau­vaise mère. Elle aurait dû être là. Cela ne serait pas arrivé !

Six­tine se réveille dans le noir, dans le coffre d’une voi­ture. Elle est ter­ro­ri­sée, atta­chée, bâillon­née. Le véhi­cule s’arrête et deux por­tières claquent. C’est un tun­nel sans fin pour Jeanne qui n’a jamais été accepté par ses beaux-parents. Et tout se délite. Elle n’a plus la force d’assurer son tra­vail de publi­ci­taire, elle quitte Richard et sa famille.
Elle ren­contre une poli­cière qui va l’aider, un père qui a perdu son fils. La vie va aller cahin-caha jusqu’à une nou­velle confron­ta­tion à l’horreur…

C’est en tant que parents que le couple de roman­ciers a abordé cette his­toire. Ils ont, pour cela, crée le per­son­nage d’une mère, une femme qui bas­cule dans l’horreur, qui se relève pour être à nou­veau confron­tée à l’indicible. Natha­lie Hug et Jérôme Camut essaient d’imaginer, et y réus­sissent avec brio, com­ment une per­sonne peut vivre de telles situa­tions, une fois, deux fois. Com­ment ressort-on de telles épreuves ?
Pour ani­mer leurs per­son­nages, le duo de roman­ciers s’attache à regar­der vivre les gens, à cer­ner la nature humaine, à cher­cher à com­prendre les atti­tudes, les moti­va­tions qui poussent cer­tains à agir comme ils le font, à accom­plir des gestes empreints d’humanité ou d’ignominie.

On res­sent tout le tra­vail d’enquête, de recherches docu­men­taires mené pour don­ner corps à une telle his­toire, inté­grant les points de vue de vic­times, de juges, d’avocats, de socio­logues, et de cou­pables ainsi que de leurs proches. Décri­vant le mar­tyre de la mère, la posi­tion du père qui était très occupé sen­ti­men­ta­le­ment au moment de la dis­pa­ri­tion, de la fillette, ils donnent dif­fé­rentes direc­tions à leur intrigue, jouant avec des rebon­dis­se­ments en nombre, des sur­prises qui donnent une sin­gu­la­rité remar­quable au récit.
Ils ne gomment pas l’atrocité, exposent des faits, des actes très dif­fi­ciles à vivre et à accepter.

Avec ce récit, Natha­lie Hug et Jérôme Camut signent une fois encore un roman d’une noir­ceur extrême, met­tant en scène l’humain dans toutes ses facettes.

serge per­raud

Jérôme Camut & Natha­lie Hug, Nos âmes au diable, Fleuve noir, coll. “Thril­lers”, mars 2022, 384 p. – 19,90 €.

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Filed under Chapeau bas, Pôle noir / Thriller

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