Meurtres à la Comédie-Française
C’est à une nouvelle enquête de Gabriel Joly que le romancier invite ses lecteurs. Le héros, dans Le Loup des Cordeliers et Le Mystère de la Main rouge, travaille pour Le Journal de Paris et rêve de faire du journalisme d’investigation dans la tourmente des premiers temps de la Révolution, en 1789.
Il se jette sur les traces d’un justicier masqué, tenant un loup en laisse, qui vole au secours des femmes agressées.
Il le traque, l’identifie mais celui-ci fuit en Corse. Là, Gabriel doit faire face à la Main rouge, une étrange société qui tente d’influer sur le contenu de la Révolution. Il se confronte alors à des événements dramatiques.
De retour à Paris, il tente de faire revivre ce justicier et sauve une jeune femme des mains de son bourreau. Il délivre des enfants soumis à la prostitution. Mais le cœur n’y est pas, ayant à faire un deuil terrible. Quand un riche négrier est tué, qu’une actrice de la Comédie Française est égorgée dans sa loge, il se laisse convaincre de reprendre du service en compagnie du commissaire Guyot.
S’il fait le lien entre ces deux meurtres improbables, il ne peut empêcher d’autres crimes qui ensanglantent les couloirs du prestigieux établissement. À un moment, persuadé que l’assassin est encore dans les murs, il fait boucler le bâtiment et, réunissant tous les présents, découvre le coupable.
Henri Lœvenbruck retient la Comédie-Française comme cadre de cette nouvelle aventure de Gabriel Joly. Ce lieu s’est, semble-t-il, imposé de lui-même car étant dans ce qui est aujourd’hui le théâtre de l’Odéon, il était en plein quartier des Cordeliers. Gabriel mais aussi Danton, Desmoulins, Marat vivent dans ce secteur.
Le personnage de Gabriel évolue, devient plus offensif, plus assuré. Le romancier lui fait vivre un drame qui transforme son caractère. Il est envahi par la peine, la colère et la soif de vengeance. Si la chute de la Bastille servait de toile de fond au Loup des Cordeliers, la nuit du 4 août pour Le Mystère de la Main rouge, c’est l’élaboration de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui sous-tend ici une partie de l’intrigue.
On retrouve une partie des acteurs des récits précédents comme Recif le pirate qui forme avec Gabriel un duo étonnant. Le romancier ménage une large place aux personnages féminins, faisant revenir l’héroïne magnifique que fut Anne-Josèphe Terwagne connue sous le nom de Théroigne de Méricourt. Mais, il montre que les femmes furent les grandes perdantes de cette révolution alors qu’elles s’étaient mobilisées avec l’efficacité qui caractérise la majorité d’entre elles.
Les “Beaux parleurs” les ont repoussées allant jusqu’à leur interdire d’intervenir dans les délibérations publiques, de faire partie de la majorité des associations politiques. Ces grands penseurs, aujourd’hui encore plus ou moins encensés, étaient d’ignobles machos !
Si l’auteur signe une intrigue en huis clos, un policier de facture classique, il fait découvrir le fonctionnement de cette Comédie Française, la vie de ce théâtre à l’époque, un récit appuyé sur une documentation compulsée aux meilleures sources.
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serge perraud
Henri Lœvenbruck, L’Assassin de la rue Voltaire, XO Éditions, octobre 2021, 480 p. – 21,90 €.