Le romancier a retenu le principe d’une intrigue basée sur une méthode de déduction qui, bien qu’elle permette au lecteur de connaître assez vite l’identité du malfaiteur, développe des stratégies et des raisonnements pour découvrir le pourquoi et le comment.
En 1912, à Pékin, un homme se presse à l’aube pour acquérir, au Marché des fantômes, le Tableau de la femme-cadavre, une merveille picturale source de nombreuses légendes.
Hong Jun rentre du tribunal en jugeant sa plaidoirie sans relief. Son assistante, la pétulante Song Ja, tente de le réconforter avec deux nouvelles. Il doit fêter la première année de l’installation de son cabinet. Quelqu’un veut le voir pour une affaire délicate, le genre d’affaire qu’il aime.
C’est le lendemain qu’il reçoit Jin Yiying, professeur d’université en informatique. Son époux, Tong Wenge, chercheur en biologie et ingénieur en chef à la Dasheng, a étrangement perdu la raison suite à une grippe endommageant son cerveau. Elle a reçu, tout récemment, écrit par son mari, un courrier électronique au contenu bizarre. Il fait référence, entre autres, au trésor de la famille dont il ne faut laisser personne s’en emparer. C’est, explique-t-elle, un tableau ancien acheté par le grand-père auquel son mari tient comme à la prunelle de ses yeux.
Une visite à l’hôpital psychiatrique en compagnie de Jin Yiying trouble profondément Hong Jun qui se demande s’il n’y a pas simulation. Dans ce cas il faudrait la complicité de Jin Yiyinhg, or elle semble sincère.
La Dasheng est une société célèbre pour son fortifiant de la mémoire mis au point par Tong Wenge. C’est en se rendant dans cette entreprise, dans le sud du pays, que Hong Jun détecte des éléments troublants…
He Jiahong prend comme cadre l’industrie pharmaceutique et les rouages d’une entreprise où des liens étroits ont tissés parmi la sphère dirigeante. Et quand il s’agit de prendre le pouvoir, les freins les plus élémentaires sautent pour laisser la place à toutes les indignités possibles, surtout si vous y ajoutez quelques sujets sentimentaux.
Le héros, cet avocat, aime s’immiscer dans des affaires qui dépassent largement le cadre de ses fonctions. Cet amour de l’enquête couronnée de succès lui vaut le surnom de Sherlock Holmes chinois. Il a comme, son homologue et modèle britannique, l’art de traquer les indices, de tirer des conclusions à partir d’observations subtiles et de stupéfier ses interlocuteurs par ce qu’il annonce, fruit d’une réflexion approfondie.
Cependant, il n’a pas pour assistant un individu aussi austère que le Dr Watson, mais une charmante et impétueuse jeune femme qui possède également de belles qualités d’enquêtrice. Et ce couple fonctionne fort bien. Autour d’eux He Jiahong compose une suite de protagonistes issus de divers milieux de la société chinoise. Il est particulièrement intéressant de découvrir les caractères dont les dote leur créateur qui, ainsi, éclaire de belle manière le fonctionnement de citoyens et des structures où ils se trouvent.
Outre le côté enquête de type policier passionnante, c’est un témoignage de premier plan sur le quotidien de la population chinoise.
Publié à Pékin en 1997, ce roman a été traduit pour les éditions de l’aube en 2004. Un cahier de notes complémentaires apporte un éclairage sur certains termes employés relatifs à un individu, une situation, des lieux.
Le mystérieux tableau ancien est un roman de déduction à la trame subtile, retorse à souhait, qui se parcourt avec grand intérêt pour ses deux niveaux de lecture.
serge perraud
He Jiahong, Le mystérieux tableau ancien (Shenmi de guhua), traduit du chinois et annoté par Marie-Claude Cantournet-Jacquet & Xiaomin Giafferri– Huang, éditions de l’aube coll. Mikros Noir, janvier 2022, 456 p. – 12,90 €.