Prix du Quai des Orfèvres 2013
Ancienne commissaire divisionnaire de la PJ, Danielle Thiéry est bien placée pour raconter une enquête de police. Et pas étonnant, avec le sens du détail et la précision qu’elle déploie dans ce roman, qu’elle ait été couronnée par ses pairs du Prix du Quai des Orfèvres 2013.
Suite à la mort suspecte d’une ancienne gloire du rock, le commandant Maxime Revel rouvre une affaire qu’au fond il n’a jamais refermée. Celle de l’assassinat non résolu, dix ans plus tôt, d’un couple de commerçants. Si cette histoire le hante toujours, c’est qu’elle coïncide avec la disparition mystérieuse de sa femme, Marieke. Englué dans un quotidien morose, fumeur invétéré qui crache ses poumons, père absent d’une jeune femme anorexique, « le vieux », comme le surnomment ses hommes – une équipe qui comporte d’ailleurs une femme – trompe la mort. Tant et si bien qu’il va devoir laisser la suite de l’enquête à son équipe, pendant qu’il va se faire diagnostiquer un cancer à l’hôpital.
La technique n’a aucun secret pour Danielle Thiéry : procédures, interrogatoires, commissions rogatoires, auditions de témoins, garde à vue, tout nous est disséqué avec précision et justesse. Point de faute possible à ce niveau. Mais ce qui donne un petit supplément d’âme à ses personnages, à son intrigue plutôt bien ficelée, c’est la plongée au cœur du quotidien de ces flics somme toute ordinaires. Qu’ils se débattent avec leurs problèmes de couple, cherchent l’amour sans le trouver, multiplient les aventures ou fuient la maison de peur de ce qu’ils vont y trouver, taciturnes – comme il est trop souvent de coutume chez les flics des romans noirs – ou diserts – ce qui est déjà plus original –, ils sont tous attachants et néanmoins crédibles.
En ce qui concerne la méthode, la découverte progressive des éléments clés de l’enquête, Thiéry parvient à décortiquer la vie et les motivations des protagonistes avec suffisamment de subtilité pour tenir le lecteur en haleine, sans trop tomber ni dans les travers habituels, ni dans les clichés attendus. Si la trame est classique, les facteurs humain et technique apportés par l’auteur lui donnent juste ce qu’il faut de tenue pour nous plaire. Un bon polar à la française que nous délivre donc Danielle Thiéry – ce qui, entre Versailles et Rambouillet, n’était pas gagné d’avance –, à qui l’on pourrait juste reprocher une drôle de façon de ponctuer ses phrases, qui donne parfois l’impression qu’elle manie moins finement la plume que les particularités du métier de flic.
agathe de lastyns
Danielle Thiéry, Des Clous dans le cœur, Fayard, novembre 2012, 396 p.- 8,90 €