Un thriller particulièrement efficace
Helen Grace est de retour pour une enquête qui va se dérouler sur une journée, débutant à 7h05 pour se terminer à 21h02 en 123 chapitres. Trois chapitres supplémentaires permettent de clore l’affaire. Elle se trouve confrontée à une série de meurtres commis dans sa juridiction. Le romancier, qui malmène régulièrement son héroïne, dans cette affaire s’acharne sur elle presque avec sadisme, l’obligeant, pour clore sa traque, à replonger dans son passé, ce passé si difficile à oublier, qui hante ses nuits, détruit ses journées.
Tôt le matin, Sonia Smalling se rend à son travail à Southampton. Elle s’arrête pour un motard accidenté. C’est un piège et elle est abattue de coups de fusil à canon scié.
Helen se remet de son arrestation et de son emprisonnement arbitraires tout en gardant rancune de ceux qui, dans sa brigade, s’étaient retournés contre elle. Pour se détendre, elle part pour une promenade sur sa nouvelle moto, manque se faire renverser par un bolide avant de trouver le corps d’une femme agonisante, une plaie béante dans la poitrine.
Emilia Garanita subit de plein fouet les conséquences de ses articles incendiaires sur Helen. Elle a dû supplier son ancien patron de la réembaucher. Elle ne traite que les faits divers basiques. Deux heures plus tard, un homme et une femme bourrés aux amphétamines tuent un pharmacien, laissant la vie sauve à une mère de famille et à son enfant en bas âge. Et la liste des crimes, de ces meurtres de sang-froid, s’allonge.
Helen et la police sont sur les dents. Mais comment, en si peu de temps, enquêter, trouver des liens entre les victimes pour anticiper, chercher des indices pour identifier les tueurs ? Pourtant il faut agir et agir vite…
Le récit se développe autour de quatre parcours principaux. On suit Helen, ses équipières et équipiers. Emilia voit dans cette histoire l’occasion de revenir en grâce, de retrouver une activité de journaliste. Les tueurs s’expriment bien que leurs motivations restent obscures pendant une large partie du roman. L’auteur donne la parole et décrit les actes de chacun dans des chapitres courts, très courts qui entraînent un besoin irrésistible de lecture. Et lâcher ce livre tant il y a de suspense, de tension, est très difficile.
Il met en scène une problématique fréquente, une fêlure psychologique, un état mental qui, sans atteindre le paroxysme développé dans le roman, donne lieu à des difficultés de vie, des traumatismes plus ou moins profonds. C’est ainsi que, peu à peu, Helen va saisir les raisons qui motivent ces meurtres, le mobile et tenter d’éviter le point final, l’ultime étape de ce parcours assassin.
Le romancier met en scène une belle galerie de personnages, leur psychologie, le choix de vie de chacun ou les obligations à subir. Mais il donne une jolie formule concernant l’un d’eux : “…elle continuera à nous inspirer et de rappeler aux générations futures que notre première responsabilité dans la vie va toujours aux autres, pas à nous-même.“
Avec une écriture dynamique, un rythme endiablé, ce récit emporte son lecteur, fait monter une tension, suscite un attrait qui ne se démet pas jusqu’à une chute impressionnante.
serge perraud
M.J. Arlidge, À la folie, pas du tout (Love Me Not) traduit de l’anglais par Séverine Quelet, Éditions 10/18, coll. “Domaine Policier”, octobre 2021, 384 p. – 8,40 €.