Science-fiction ou probable futur ?
Les populations sont regroupées autour des accès à l’eau, une eau canalisée par d’immenses pipelines au seul profit d’une caste dictatoriale. Le reste de la planète est un désert où seuls quelques bergers osent s’aventurer. Jarri Tchepalt est l’un d’eux. Mais, quand on lui massacre son troupeau, il s’aventure dans une cité pour venger la mort de ses bêtes. Il intègre un mouvement de rébellion, rencontre Korienzé, une jeune femme, et va être l’artisan de la chute de ce pouvoir en place qui contrôlait les réseaux d’eau.
Le second volume de la saga se déroule vingt ans après. L’ouverture des canalisations a modifié les équilibres. D’une civilisation terrestre, il a fallu passer à des sociétés lacustres, construire des immenses radeaux pour sauver les populations. Jarri et Koreinzé se sont mariés, des jumelles venant concrétiser leur union, il y a seize ans. Ils vivent dans la ville lacustre d’Andamanis.
À l’époque, dans la ville haute, l’officier Isao veut éradiquer la race humaine de la surface de la Terre. Il constitue une force de pirates, construit un vaisseau guerrier et attaque les villes flottantes qui croisent sa route. Il y a cinq ans, il s’en est pris à Andamanis. Mais, alors que la cité-forêt brûlait, un violent orage a éteint l’incendie. Korienzé a alors décidé d’agir et elle est partie sur le bateau pirate pour mettre fin aux exactions.
Si Jarri attend son retour, des événements se précipitent qui vont impliquer les jumelles…
Après la sécheresse, ce sont les inondations qui mettent en péril les humains. Si dans son premier volume Vincent Perriot privait l’accès libre à l’eau, il ne reprenait qu’une situation qui existe déjà, par exemple, sur le continent Australien. Les agriculteurs doivent payer à des sociétés privées pour disposer de l’eau nécessaire aux irrigations. De par le monde, cette eau fait saliver nombre de spéculateurs qui voient dans la confiscation de l’or bleu une rentabilité bien supérieure à celle de l’or noir.
Dans le second volet, l’humanité doit s’adapter et vivre sur les océans, l’eau ayant pratiquement recouvert la totalité des terres. De nouvelles espèces se sont développées. Jarri, jadis berger, est devenu harponneur et tel le célébrissime Achab de Moby Dick, chasse d’énormes basilosaures.
S’appuyant sur des projections élaborées par des chercheurs quant à l’évolution du climat, Vincent Perriot laisse libre cours à son imagination pour proposer un futur forgé par des catastrophes de toutes natures.
Si son scénario est particulièrement intéressant, l’atout maître de la saga est le graphisme. En effet, entre les dessins de l’auteur et les couleurs de Florence Breton, c’est une féérie d’images qui défile sous nos yeux. Ils réalisent des pleines pages flamboyantes, des perspectives remarquables, des vues superbes qui mettent en scène des éléments déchaînés, des planches qui réunissent aussi bien des animaux préhistoriques que des vaisseaux aux formes innovantes.
Florence Breton joue avec une gamme de couleurs vives, des teintes soutenues, n’hésitant pas à proposer des contrastes étonnants, mais si évocateurs.
Mêlant science-fiction, faune et flore antédiluviens, catastrophes climatiques à foison, Vincent Perriot réalise un album qui mobilise l’attention tant par le traitement du sujet, la palette des personnages que par un graphisme sublimé par la mise en couleurs de Florence Breton.
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serge perraud
Vincent Perriot (scénario et dessins) & Florence Breton (couleurs), Negalyod — volume 2 : Le Dernier mot, Casterman, octobre 2021, 200 p. – 25,00 €.