Hubert et Vincent Mallié, Ténébreuse – Première partie

Un conte ? Oui, mais pas que…

Dans cette pre­mière par­tie, Hubert a ras­sem­blé, dans un uni­vers médié­val fan­tas­tique, toutes les com­po­santes de ces contes où un che­va­lier délivre une prin­cesse. Après quelques péri­pé­ties, ils se découvrent jeunes, beaux, se marient et… mais le scé­na­riste intègre des élé­ments qui, très vite, font dévier le cours attendu et donnent une tona­lité curieuse. Le conte tourne à l’aigre.
La prin­cesse, elle est belle, pos­sède des capa­ci­tés peu ordi­naires qui l’excluent, de fait, de la société. Le che­va­lier n’a rien d’un prince char­mant et les trois vieilles ne res­semblent pas à des fées atten­tives et béné­fiques. Loin de là !

Aidé par son écuyer pour se tenir debout parce qu’il est pas­sa­ble­ment émé­ché, Arz­hur est apos­tro­phé par des hommes qui lui rap­prochent de désho­no­rer la che­va­le­rie. Il engage un com­bat… perdu d’avance.
À l’écart du vil­lage, il est accosté par trois vieilles femmes qui lui offrent de l’or pour déli­vrer une jeune fille de sang royal. C’est l’occasion d’une seconde chance. Le roi, son père, le récom­pen­sera et lui per­met­tra de se rache­ter. Mal­gré la mise en garde de son écuyer, il accepte. Après un mois de voyage, ils arrivent en vue d’un châ­teau noir où, d’après les vieilles, la prin­cesse Islen est pri­son­nière d’horribles créatures.

Au moment du com­bat, les vieilles lui confient une épée, la seule capable de tran­cher les monstres. Et, il tranche si bien qu’il ne reste que la prin­cesse qui se déses­père de la mort de ses ani­maux. Elle traite Arz­hur de monstre. Les trois femmes veulent entraî­ner la jeune femme qui résiste. Elle ne veut pas res­ter en leur com­pa­gnie, mais ren­trer chez son père. Arz­hur envoie son écuyer deman­der une escorte. En cours de route, seule avec lui, Islen raconte. Elle pos­sède des pou­voirs venant de sa mère. Celle-ci a ravagé le royaume et tous redoutent sa fille.
Vic­time d’un com­plot ourdi par les vieilles dépi­tées de voir leur proie s’échapper, Arz­hur et Islen vont devoir s’allier pour se défendre… et vite…

Avec Islen, le scé­na­riste se penche sur l’héritage, raconte l’importance de la trans­mis­sion, le poids légué par les géni­teurs. Elle a reçu les dons que déte­nait sa mère, des dons encore plus puis­sants qui la font craindre et qui l’isolent. Elle se retrouve seule, une excep­tion, dans un pays peu­plé de gens ordi­naires. Mais, si tout le monde a peur d’elle, elle est aussi ter­ri­fiée.
Le che­va­lier porte un secret, il a fait une énorme erreur qui la met au ban de la société. Hubert réunit deux parias, cha­cun à sa manière, cha­cun à la recherche d’une rédemption.

Vincent Mal­lié assure la mise en images. Avec un trait réa­liste, puis­sant, il met aussi super­be­ment des séquences intimes de confi­dences entre les deux héros que les com­bats ou les ravages pro­vo­qués par les pou­voirs déchaî­nés des deux femmes, la mère et la fille. Il use adroi­te­ment de cadrages, d’une répar­ti­tion très étu­diée des cases dans la planche pour don­ner une lec­ture d’une agréable faci­lité. Il pro­pose de nom­breux détails qui mettent en valeur le récit. Ses décors sont attrac­tifs et il donne une belle expres­si­vité à ses pro­ta­go­nistes.
Un pre­mier volume à la lec­ture fort plai­sante tant pour la qua­lité du scé­na­rio d’Hubert que pour le tra­vail gra­phique de Vincent Mallié.

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serge per­raud

Hubert (scé­na­rio) & Vincent Mal­lié (des­sin et cou­leurs), Téné­breuse — Pre­mière par­tie, Dupuis coll. “Aire Libre”, octobre 2021, 80 p. – 19,95 €.

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