Ruth Ware, Les Cinq règles du mensonge

Un thril­ler atypique 

Ruth Ware concocte une intrigue sin­gu­lière avec des va-et-vient entre passé et pré­sent, le passé de quatre ado­les­centes et le pré­sent de quatre femmes adultes dont deux sont mères de famille. Elles ont toutes construit une vie per­son­nelle, une car­rière pro­fes­sion­nelle qu’elles ne veulent pas voir remise en ques­tion, voire anéan­tie par un scan­dale.
La roman­cière a retenu un cadre fan­to­ma­tique avec une étrange bâtisse qui s’enfonce peu à peu, construite sur une bande de sable. Faut-il voir un paral­lèle entre cette situa­tion et celle de ces quatre amies liées par un secret ? Que s’est-il passé pour qu’elles aban­donnent tout ?

L’auteure fait revivre ce moment de leur passé tout en lais­sant pla­ner le mys­tère. Il n’y a pas d’actions spec­ta­cu­laires, de coups de théâtre explo­sifs, de brusques rebon­dis­se­ments. Mais Ruth sait si bien manier son récit qu’on se retrouve pris par celui-ci, qu’on sou­haite décou­vrir ce sombre secret qui scelle ces quatre jeunes femmes si atta­chantes, ces quatre fief­fées menteuses.

Alors qu’en pleine nuit, elle donne le sein à Freya, Isa reçoit un texto. Il com­porte trois mots : Besoin de vous. Elle sait immé­dia­te­ment qui l’envoie et répond : J’arrive. C’est aussi ce que vont répondre Thea et Fatima. Au matin, elle explique à Owen, son com­pa­gnon, qu’elle part quelques jours, invi­tée par Kate Ata­gon. Et cette déci­sion ne se dis­cute pas.
Isa se sou­vient de leur ren­contre alors qu’elle se ren­dait pour la pre­mière fois à Sal­ten House, un lycée privé. Les sou­ve­nirs reviennent, l’amitié entre les quatre ado­les­centes et Le Jeu du Men­songe.
Ce sont les retrou­vailles entre Fatima, Thea, Kate et elle au Mou­lin des Bri­sants, une sin­gu­lière bâtisse, demeure fami­liale que Kate habite tou­jours. C’est au dîner, lorsqu’elles sont seules et atten­tives, que Kate dévoile les rai­sons qui motivent cette réunion urgente. Un os humain dans l’estuaire titre le jour­nal local. Et elles se remé­morent ce qui s’est passé, il y a dix-sept ans…

Elles ont scellé cette forte ami­tié dans ce lycée situé dans une ville côtière du Sud de l’Angleterre. Le père de Kate, Ambrose Ata­gon, est pro­fes­seur de des­sin dans l’établissement. Il habite le Mou­lin des Bri­sants, au bord de l’eau, à quelques kilo­mètres. C’est là que les quatre ado­les­centes de quinze ans, vont se réunir le week-end, décou­vrir un espace de liberté. C’est là qu’elles vont déve­lop­per Le Jeu du Men­songe qui consiste à men­tir à tout le monde sauf à elles. Il y a aussi Luc, le demi-frère de Kate, et son père qui va les prendre pour modèles mul­ti­pliant des­sins et tableaux. Tout le récit passe par la nar­ra­tion d’Isa.

Avec une étude psy­cho­lo­gique pous­sée sur ses per­son­nages, avec les visions d’adolescentes qui, par manque de recul, d’expérience, n’appréhendent pas les causes de cer­taines situa­tions et l’appréciation des adultes qu’elles sont deve­nues, l’histoire est remar­qua­ble­ment menée !
Un roman à l’intrigue qui semble se diluer dans un quo­ti­dien tant passé que pré­sent, mais qui est très aiguisé en matière de sen­ti­ments et d’émotions.

serge Per­raud

Ruth Ware, Les Cinq règles du men­songe (The Lying Game), tra­duit de l’anglais (Royaume-Uni) par Héloïse Esquié, Fleuve noir, coll. “Poli­cier & Thril­ler”, Mars 2021, 432 p. – 20,90 €.

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