Jean-Christophe Portes, L’Assassin de Septembre

Une belle osmose entre His­toire et polar 

Fin août 1792, dans l’après-midi, deux cava­liers arrivent en vue de Ver­dun assiégé. Le jeune lieu­te­nant de gen­dar­me­rie, Vic­tor Dau­te­rive, accom­pa­gné de Joseph, doit for­cer les bar­rages des Prus­siens pour por­ter un mes­sage de Dan­ton au com­man­dant de la place forte. Le Conseil exé­cu­tif demande à Nico­las Beau­re­paire de tenir au moins quatre semaines. Des troupes se ras­semblent, des volon­taires viennent de par­tout pour défendre la Patrie. Ayant réussi à fran­chir la plaine inon­dée devant les for­ti­fi­ca­tions, Vic­tor délivre son mes­sage face à un homme qui semble exté­nué.
Les bom­bar­de­ments enne­mis reprennent et un obus frappe une mai­son qui s’enflamme. Vic­tor et des sol­dats se pré­ci­pitent. Mais une foule, encou­ra­gée par quelques meneurs, est hos­tile à la pour­suite des com­bats. Vic­tor remarque un jeune homme qu’il a déjà vu quelque part et dont la pré­sence lui semble une menace.

À Auteuil, Olympe de Gouges reçoit une visite très inat­ten­due. C’est le frère aîné de Vic­tor qui vient sol­li­ci­ter son aide. Son père et lui sont venus de Bour­gogne à Paris pour défendre le roi, pen­dant les évé­ne­ments du 10 août. Mais son père a dis­paru. Il pense qu’il a été arrêté dans la vague des der­niers jours. Olympe revient à Paris et contacte Duper­rier, un ami de Vic­tor, qui a été gref­fier de jus­tice pen­dant plus de qua­rante ans. En ques­tion­nant des par­ti­sans de la red­di­tion, Vic­tor apprend que cet homme, qu’il pense connaître, s’est joint, juste avant le siège, à une troupe de forains et qu’il se fait appe­ler Franz.
Beau­re­paire est assas­siné, la ville est inves­tie. De retour à Paris, Vic­tor se retrouve mêlé à plu­sieurs crises et amène, invo­lon­tai­re­ment, son amie Olympe à se mettre en grand danger…

Jean-Christophe Portes pro­pose une véri­table His­toire de cette période sans fards ni volonté par­ti­sane. Il raconte, à par­tir d’éléments his­to­riques fon­dés, les évé­ne­ments tels qu’ils se sont dérou­lés et les hommes qui les ont faits tels qu’ils étaient. Cette série, déjà riche de six volumes, relate en une belle éru­di­tion la réa­lité de ce qui fut sanc­ti­fié, porté aux nues avec des héros lut­tant pour la Liberté, aux idées sociales fortes pour don­ner le bon­heur au peuple, appor­ter une ère de féli­cité à tous.
L’auteur montre une triste vérité avec les ambi­tions déme­su­rées, les ego sur­di­men­sion­nés, les cor­rup­tions, l’appât du gain, des hon­neurs, du pou­voir, les dénon­cia­tions, les tra­hi­sons… Il donne une vue réelle des faits, des hommes. Il éclaire cepen­dant son pro­pos avec son per­son­nage prin­ci­pal, per­son­nage de fic­tion, qui croit à la beauté des idéaux pro­mul­gués par cette Révo­lu­tion, avec cette magni­fique figure fémi­nine que fut Olympe de Gouges qui resta fidèle à ses opi­nions, elle !!!

Précis pour toutes les facettes de son intrigue, Jean-Christophe Portes raconte le quo­ti­dien de cette époque, donne des détails piquants quant aux mœurs et aux pra­tiques. Il relate, en étant le plus exhaus­tif pos­sible, ces mas­sacres de sep­tembre 1792, tente d’expliquer les causes et les moti­va­tions des meur­triers. Il évoque la pré­sence constante d’espions anglais dans Paris, sur le ter­ri­toire. Sont-ils, comme un témoin le décrit, les res­pon­sables du com­men­ce­ment de ces tue­ries ? Il est cer­tain que l’Angleterre voyait d’un très mau­vais œil la pré­sence des Fran­çais en Bel­gique et aux Pays-Bas.
Contre qui cette fureur homi­cide était-elle tour­née ? Elle fut, en par­tie, cana­li­sée car sur les mille trois cents morts, seuls trois cents sont des aris­to­crates et des prêtres. Ce sont les pri­son­niers de droit com­mun qui ont payé le plus lourd tri­but, les femmes vio­lées à la Sal­pê­trière, les trente enfants mas­sa­crés à Bicêtre et l’assassinat de la prin­cesse de Lam­balle dont le corps fut profané.

Le roman­cier consigne le récit du fameux vol du Garde-Meuble et raconte, pui­sant aux meilleures sources, les pré­pa­ra­tifs et la bataille de Valmy. Roman poli­cier his­to­rique, ce livre est celui d’un véri­table his­to­rien qui sait rendre la lec­ture de ces évé­ne­ments fon­da­teurs d’une nou­velle approche gou­ver­ne­men­tale si attrayante.

serge per­raud

Jean-Christophe Portes, L’Assassin de Sep­tembre, City Édi­tions, octobre 2020, 480 p. – 19,90 €.

Leave a Comment

Filed under Pôle noir / Thriller

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>