Une comédie humaine dans la Russie d’aujourd’hui
L’intrigue du livre est assez simple, voire ténue : nous suivons tour à tour les trois membres de la famille Petrov, réunis outre leur lien familial par l’épidémie de grippe.
Nous commençons par Petrov, cueilli à la sortie du travail par un ami qui l’entraîne dans une nuit de beuverie ; nous verrons ensuite les tergiversations de sa femme, dévorée par une impulsion meurtrière ; puis les tribulations du fils, désireux d’assister à une fête du Nouvel an.
Située dans une ville de Russie post-soviétique, l’action du roman dépeint des existences où la normalité et la banalité prennent l’allure de la folie et de l’absurdité les plus totales.
Les membres de cette famille, qui ne sont quasiment tous désignés que par leur nom de famille (Petrov, Petrova et Petrov junior) parmi les plus répandus de Russie, ont beau rationnaliser leurs faits et gestes, ils n’en apparaissent que plus délirants, suggérant que c’est toute la société, dont ils sont des représentants sans rien d’exceptionnel, qui marche sur la tête.
Si le propos d’Alexei Salnikov est plutôt désabusé et nous donne à voir des existences dénuées de sens, la tonalité du récit, en revanche, est des plus drôles. J’avoue avoir plus d’une fois éclaté de rire en lisant telle ou telle péripétie de l’existence des Petrov. L’auteur réussit par exemple à traiter les atermoiements de Serguei, un ami de Petrov, écrivain qui n’a même pas le temps de devenir raté mais que Petrov aidera à se suicider de manière tout à fait cocasse.
Si bien que l’existence dans son entier apparaît sous sa plume comme une comédie à la fois pathétique et risible.
Bref, on l’aura compris, Les Petrov, la grippe, etc. est une belle découverte des éditions des Syrtes, une de plus après La Traque, et la preuve s’il en était encore besoin que la littérature russe contemporaine regorge d’écrivains qui, pour être très différents, n’en sont pas moins de grande valeur.
On attend avec impatience un prochain opus d’Alexei Salnikov.
agathe de lastyns
Alexei Salnikov, Les Petrov, la grippe etc., traduit du russe par Véronique Patte, Syrtes, août 2020, 305 p. – 22,00 €.