Fred Duval, Fred Blanchard & Emem, Renaissance – t.03 : “Permafrost”

Une belle anticipation…

Renais­sance est le nom du pro­jet conçu au sein de la fédé­ra­tion de pla­nètes réunies dans le Com­plexe. Tech­no­lo­gi­que­ment et socia­le­ment très avan­cées, ces civi­li­sa­tions ont décidé de venir en aide aux humains, sur une Terre qui n’en peut plus… en 2084. Les res­sources natu­relles sont épui­sées, une pan­dé­mie ravage les popu­la­tions et des machines com­man­dées par des algo­rithmes hos­tiles attaquent les humains.
Swänn et Sätie, un jeune couple qui se des­ti­nait à une vie pai­sible sur leur lieu d’origine, Näkän, une des pla­nètes majeures du Com­plexe, sont mobi­li­sés et font par­tie de l’expédition. Ils vont être sépa­rés. Le pre­mier sera au Texas où il ren­con­trera Liz, une femme-pompier spé­cia­li­sée dans l’extinction des incen­dies de puits de pétrole. La seconde se retrouve en France pour lut­ter contre la pandémie.

Pour l’heure, au début du tome 3, la situa­tion au Texas est dra­ma­tique et les popu­la­tions fuient les feux des puits de pétrole et les machines guer­rières en vou­lant fran­chir le mur qui les séparent du Mexique. Swänn est avec Liz ne sachant com­ment lui révé­ler la mort de son mari et des deux filles, assas­si­nés par des contre­ban­diers Skuälls.
Sätie découvre des hor­reurs, des humains asser­vis, affa­més pour pro­duire l’énergie d’une Algo. Aidée par Hélène, elle va pou­voir avan­cer et soi­gner ces popu­la­tions en déshé­rence d’autant que l’Algo livre des indi­ca­tions sur le Patient Zéro.
Paral­lè­le­ment, au sein du Com­plexe, des par­ties pre­nantes pour­suivent des objec­tifs bien dif­fé­rents allant jusqu’à remettre en cause la durée de l’opération Renais­sance.
Si Swänn va devoir affron­ter ces contre­ban­diers, ces tueurs, Sätie, suite à une infor­ma­tion don­née en signe de bonne foi, doit par­tir en Sibé­rie. Bien avant cette opé­ra­tion, des extra­ter­restres sont venus sur Terre et les consé­quences de leur pas­sage se font encore sentir…

Ce n’est pas la pre­mière fois que des extra­ter­restres viennent sur Terre, soit pour conqué­rir, soit pour aider. Sou­vent cette aide n’est pas dés­in­té­res­sée et s’apparente à une conquête ou, à minima, une exploi­ta­tion de ce qui peut être utile.
Fred Duval prend le parti d’une aide huma­ni­taire, bien que des fac­tions louchent encore sur le peu qui reste. Avec son couple de héros à la ren­contre d’humains, il déve­loppe une intrigue forte inté­grant nombre de concepts, de don­nées, de sujets, nour­ris­sant son pro­pos avec l’actualité.
C’est ainsi qu’il montre les ravages des sys­tèmes colo­niaux, déve­loppe une épi­dé­mie sévère et fait recher­cher le Patient Zéro. N’osant pas le pla­cer à Wuhan, il évoque la Sibé­rie, zone peu éloi­gnée, à l’échelle pla­né­taire, du point de départ de l’épidémie de la Covid-19. Tou­te­fois, la Sibé­rie offre, dans le cadre de son intrigue, des poten­tia­li­tés non négligeables.

Il consacre une part de son récit aux algo­rithmes, pla­çant ces Intel­li­gences Arti­fi­cielles comme de poten­tielles enne­mies du genre humain. Il uti­lise éga­le­ment la fonte du per­ma­frost. Il livre des images, des réflexions pleines de réa­lisme et d’ironie comme celle rela­tive au mur entre le Mexique et le Texas, financé par cette vieille fri­pouille de Trump. Il parle de l’origine du racisme quand les exac­tions de quelques-uns rejaillissent sur toute une com­mu­nauté. Il mini­mise la ran­cune des Mexi­cains qui ont été, pen­dant un siècle, consi­dé­rés par les amé­ri­cains comme des para­sites en som­bréro.
Mais Fred Duval donne aussi une belle place à ses héroïnes, fai­sant d’elles des élé­ments posi­tifs, seules dans cette débâcle capables d’un peu de réflexion utile pour com­battre les fléaux.

Fred Blan­chard assure les desi­gns, Emem le des­sin et la cou­leur. Il en résulte un tra­vail gra­phique de toute beauté tant par la variété et l’inventivité des décors, de leur côté fan­tas­tique, que par les per­son­nages et les extra­ter­restres. Comme il est réussi le Cro­co­dy­lus acu­tus qui se laisse grat­ter sous la gueule avec une mimique proche de celle que peut avoir un chat dans la même situa­tion.
Ce troi­sième tome, qui signe la fin d’une pre­mière époque, est remar­quable en tous points et fait espé­rer une suite à paraître le plus tôt pos­sible tant l’histoire est riche et attrac­tive, si joli­ment mise en images.

serge per­raud

Fred Duval (scé­na­rio), Fred Blan­chard (design) & Emem (des­sin et cou­leur), Renais­sance – t.03 : Per­ma­frost, Dar­gaud, sep­tembre 2020, 56 p. – 14,50 €.

Leave a Comment

Filed under Bande dessinée

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>