Du rôle incontestable des femmes
Le monde de l’édition s’intéresse aux personnages des Rois maudits de Maurice Druon. Après Mahaut d’Artois et les trois fils de Philippe le Bel, c’est au tour d’Isabelle de France d’être l’objet d’une biographie, écrite par Sophie Brouquet.
Les admirateurs de l’œuvre de Maurice Druon la liront avec un très grand intérêt tant le portrait tracé par l’historienne est à cent mille lieues du personnage du roman.
La princesse, imbue de l’orgueil de sa race capétienne, héritière des qualités politiques de son père, a sans doute joué un rôle dans la chute de ses belles-sœurs adultères mais Sophie Brouquet reste très prudente sur la réalité de son implication. Autre légende mise en morceaux : la désunion du couple qu’Isabelle formait avec Edouard II d’Angleterre.
Bien au contraire – et c’est à mon avis l’apport majeur de l’ouvrage –, on découvre une reine fervente soutien de son époux, empêtré dans sa passion pour ses différents favoris (Gaveston, puis Despenser) dont il n’est d’ailleurs pas certain qu’ils aient été les amants du souverain.
Certes, l’influence grandissante de Hugues Despenser met à mal les relations conjugales, d’où la rupture d’Isabelle et d’Edouard, avant tout politique, qui entraîne le débarquement de la reine en Angleterre qui n’est pas sans annoncer celui de Guillaume d’Orange et de Mary II bien des siècles plus tard.
Mais là aussi, Sophie Brouquet apporte d’intéressants éléments sur l’affection que la reine continua à éprouver son le roi déchu.
Enfin, cette étude nous plonge dans la vie itinérante de la cour d’Angleterre, dans le fonctionnement de la maison de la reine – qui aimait l’argent, le luxe et la chevalerie – et dans les affres politiques d’outre-Manche.
L’auteur ne fait pas de la reine une icône féministe mais la replace dans ce temps médiéval où, on le voit, les femmes jouent un rôle incontestable, voire de premier plan.
frederic le moal
Sophie Brouquet, Isabelle de France. Reine d’Angleterre, Perrin, août 2020, 380 p., 23, 00 €.