Éric Giacometti & Jacques Ravenne, La saga du Soleil noir – t.03 : “La relique du chaos”

Un bel éclai­rage d’une face sombre du nazisme 

Avec un roman d’Éric Gia­co­metti et de Jacques Ravenne le lec­teur est assuré de trou­ver des infor­ma­tions his­to­riques authen­tiques de pre­mier ordre et des déve­lop­pe­ments fic­tion­nels d’une belle inven­ti­vité.
Ils maî­trisent l’art d’entremêler les deux domaines avec un natu­rel qui donne un réa­lisme frap­pant à leur récit.

C’est en 1938, à Ber­lin, que Karl Weis­tort, un colo­nel SS, tue un libraire juif et lui vole le Thule Borea­lis Kul­ten, un ouvrage ancien qui décrit la légende de quatre reliques sacrées qui ont l’apparence de croix gam­mées. Celui qui en pos­sède une change le cours de l’Histoire.
Lorsque débute le troi­sième tome de la saga, en juillet 1942, l’Allemagne pos­sède une relique tout comme les États-Unis. Une autre est défi­ni­ti­ve­ment per­due. C’est celui qui met­tra la main sur la qua­trième qui…

Ce troi­sième tome s’ouvre avec un pro­logue qui raconte les der­nières heures des Roma­nov, le 17 juillet 1918, dans la mai­son Ipa­tiev. Le récit revient en 1942 alors que Tris­tan Mar­cas est en route pour retrou­ver Erika dans sa demeure. Celle-ci a été bles­sée à Venise lors de l’attentat man­qué contre Hit­ler et Mus­so­lini. Elle a perdu la mémoire de ces ins­tants dra­ma­tiques et n’a pas vu, alors, l’attitude de Tris­tan en tant qu’agent double. Si elle se sou­vient de ce qu’il a fait à ce moment-là, il risque la mort. L’entrevue entre les deux amants est écour­tée par deux sol­dats qui sont char­gés d’emmener Tris­tan, séance tenante, chez Himm­ler.
En Angle­terre, sur le site de Sto­ne­henge, Laure assiste à l’opération Wit­ch­fall où des groupes de druides et autres prê­tresses invoquent des anciennes divi­ni­tés pour envoû­ter Hit­ler et son âme dam­née. C’est sous l’impulsion d’Aleister Crow­ley que le com­man­der Malor­ley s’est laissé convaincre. Alors qu’Erika semble retrou­ver la mémoire, que Laure a inté­gré le SOE, un ser­vice spé­cia­le­ment créé pour retrou­ver ces swas­tis­kas magiques cen­sés sau­ver le monde libre, Tris­tan est chargé par Himm­ler, lui-même, de récu­pé­rer cette qua­trième relique quel qu’en soit le prix,…

Dans cette tri­lo­gie, les auteurs explorent un des volets obs­curs du nazisme, celui lié à des croyances éso­té­riques quant à une civi­li­sa­tion supé­rieure et aux pou­voirs de ses arte­facts. La saga se déroule de 1938 à 1942 et les auteurs ins­tallent l’action du pré­sent tome entre Londres, Paris, Ber­lin, Mos­cou, le Dane­mark…
Le récit s’appuie sur trois per­son­nages prin­ci­paux. Hon­neur aux dames avec Erika von Ess­ling, une archéo­logue alle­mande ral­liée aux doc­trines nazies. Elle dirige l’Ahnenerbe, cette struc­ture créée par Himm­ler pour ses recherches éso­té­riques. Laure d’Estillac, dont la famille est pro­prié­taire du châ­teau de Mont­sé­gur, n’a pas appré­cié l’intrusion alle­mande pour s’emparer d’un swas­tika caché dans le domaine. Elle rejoint Londres et devient une agente du SOE. Tris­tan Mar­cas est un tra­fi­quant d’art fran­çais. Il a été sorti d’une pri­son bar­ce­lo­naise par l’assassin du libraire juif pour recher­cher les reliques.

Le com­man­der Malor­ley qui dirige le SOE, le cama­rade Evgueni qui était pré­sent lors du mas­sacre des Roma­nov com­plètent heu­reu­se­ment cette gale­rie de « Pre­miers cou­teaux ». Et, bien sûr, Himm­ler, Sta­line, Chur­chill, des théo­ri­ciens occupent une place impor­tante dans le récit.
Les roman­ciers racontent com­ment l’Ahnenerbe a fait bas­cu­ler dans l’horreur cette période déjà riche en la matière quand ils ont dû, sous la pres­sion des SS, défi­nir les cri­tères ana­to­miques de la judéité et ce qui s’en est suivi. Ils décrivent un Sta­line qui, bien qu’affichant un pro­fond mépris pour tout ce qui avait trait au spi­ri­tuel et à l’ésotérisme, consul­tait régu­liè­re­ment deux médiums.
Un des plus haut cadres du Gué­péou, qui a servi de modèle à Evgueni, se pas­sion­nait pour la para­psy­cho­lo­gie et le cha­ma­nisme. Des agents étaient char­gés de trou­ver dans deux cités mythiques per­dues du Tibet des livres anciens révé­lant des secrets technologiques.

Giaco­metti et Ravenne réa­lisent une magni­fique recons­ti­tu­tion de l’histoire de ces illu­mi­nés dans la pre­mière par­tie du XXe siècle, que ce soit l’inénarrable Aleis­ter Crow­ley ou Alfred Rosen­berg, un des pen­seurs essen­tiels du Reich. Les auteurs décrivent avec grandes pré­ci­sion et jus­tesse la folie de ce ramas­sis de voyous qui ont mené le monde entier dans un conflit ter­rible.
Avec une docu­men­ta­tion solide, un art du récit, ils livrent des romans abso­lu­ment pas­sion­nants, par­ti­cu­liè­re­ment ce troi­sième tome qui clôt, en apo­théose une saga des plus fascinantes.

lire un extrait

serge per­raud

Éric Gia­co­metti & Jacques Ravenne, La saga du Soleil noir – t.03 : La relique du chaos, JC Lat­tès, juin 2020, 432 p. – 22,00 €.

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Filed under Chapeau bas, Pôle noir / Thriller

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