Michaël Sanlaville, San-Antonio — t.02: “Si ma tante en avait”

Une belle adap­ta­tion d’un monu­ment de la lit­té­ra­ture populaire 

Michaël San­la­ville s’est déjà confronté à l’univers du com­mis­saire San-Antonio, per­son­nage crée en 1949 par Fré­dé­ric Dard. Chez Cas­ter­man, il a adapté et mis en images, en mars 2018, San-Antonio chez les gones, roman paru en novembre 1962 aux édi­tions Fleuve noir, le 51ème de la saga.
Il revient avec Si ma tante en avait, un texte publié en avril 1978, le 97ème de la série.

San-Antonio regarde d’un air maus­sade tom­ber la pluie sur un pay­sage bre­ton. Suite à sa der­nière enquête, Béru­rier et lui ont été mutés à Ploumana’ch Ver­moh. Il a emmé­nagé, avec Féli­cie, sa maman, dans une villa et Marie-Marie, s’est ins­crite à la fac de Quim­per.
Suite à une plainte, les gen­darmes ont arrêté un indi­vidu qui fait du porte-à-porte avec du maté­riel por­no­gra­phique. Il s’agit de Pinu­chet, son ancien col­lègue qui a pris sa retraite et qui espère com­plé­ter sa maigre pension.

San-A. est convo­qué par le sous-préfet. Il découvre, stu­pé­fait, qu’il s’agit du Vieux, son Patron à la police pari­sienne. Il explique qu’ils ont été vic­times des jalou­sies de leurs enne­mis dans l’administration. En repar­tant, il tombe sur deux hommes qui se bagarrent. Au poste, Béru­rier recon­naît Tan­guy Liau­ra­dés­hom, dit Tango-la Nitro, un spé­cia­liste dans l’ouverture des coffres avec… de la nitro. L’autre homme, Jean-Yves Kat­karre est un patron-pêcheur. Ni l’un ni l’autre ne sou­hai­tant por­ter plaine, ils sont libé­rés. C’est le len­de­main que Kat­karre est retrouvé noyé alors que Tango a dis­paru. Lorsque le com­mis­saire reçoit un appel télé­pho­nique l’enjoignant à ouvrir la fenêtre pour mieux entendre l’explosion, il voit la par­tie supé­rieure du phare de la pointe du Chaz s’envoler.
Le séjour en Bre­tagne prend alors un tour bien mouvementé…

Frédé­ric Dard, avec San-Antonio, met­tait en avant une langue pro­di­gieuse, un mélange peu com­mun d’humour, de jeux de mots, de gags, un fes­ti­val de termes d’argot, de vocables crées selon ses besoins, n’hésitant pas à appe­ler un chat un chat, usant de gri­voi­se­rie, décri­vant à sa manière les ébats amou­reux de son com­mis­saire chaud-lapin, de son adjoint tout aussi porté sur le sexe. Il avait un sens inné du sus­pense, de la rhé­to­rique et ser­vait le tout avec un style très enlevé. Il pro­po­sait des digres­sions impromp­tues mais tou­jours très per­ti­nentes sur le fond.
Michaël San­la­ville res­ti­tue par­fai­te­ment la faconde du roman­cier, adap­tant avec talent cette his­toire poli­cière tein­tée d’espionnage, un récit qui se découvre avec un grand plaisir.

Il assure une mise en images superbe, avec des des­sins aux traits dyna­miques, des per­son­nages bien cam­pés et des cou­leurs flam­boyantes. Si ses per­son­nages sont fort réus­sis, il offre des décors magni­fiques ren­dant la réa­lité d’une mer démon­tée, de flots déchaî­nés, des chocs bru­taux entre les hommes et les élé­ments natu­rels ou entre eux. Le décou­page est tonique.
Il pro­pose aussi un jeu amu­sant, la recherche des per­son­nages réels ou de fic­tion qu’il s’amuse à cro­quer. Au fil des pages, on découvre des res­sem­blances avec Bri­gitte Bar­dot, Serge Gains­bourg dans un rôle bien inat­tendu, le capi­taine Had­dock, Corto Mal­tese et bien d’autres…

Sanla­ville ter­mine l’album avec une planche expli­ci­tant son grand inté­rêt pour les romans de San-Antonio et les petites pro­vo­ca­tions qu’il se per­met­tait de faire, quand il était étu­diant, en affi­chant ses lec­tures.
Avec ce second volet des enquêtes du com­mis­saire San-Antonio, Michaël San­la­ville réus­sit une très belle adap­ta­tion en bande dessinée.

feuille­ter l’album

serge per­raud

Michaël San­la­ville (scé­na­rio, des­sin, cou­leur), San-Antonio — t.02 : Si ma tante en avait, Cas­ter­man, juin 2020, 96 p. – 16,00 €.

 

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