Catherine de Médicis est restée dans l’Histoire comme l’instigatrice du massacre de la Saint-Barthélemy. Longtemps, elle a été présentée comme une reine maudite entre toutes, les historiens reprenant les mêmes arguments sans chercher à approfondir. Ce n’est que récemment que l’image de cette femme évolue en lui attribuant un rôle plus positif.
Certes, elle a été entourée de personnages douteux, de sa jeunesse difficile elle avait sans doute gardé quelques traumatismes qui influaient sur ses décisions.
Au château de Blois, en 1589, Catherine de Médicis est avec son confesseur quand elle fait un malaise et se voit dans une mare de sang au milieu de cadavres. Si elle veut soulager sa conscience, elle veut surtout expliquer les circonstances qui ont engendré ces massacres lors de la Saint-Barthélemy et les événements qui ont suivi.
Avec son fils, le roi Charles IX, elle cherche à réconcilier, à maintenir une unité dans ce royaume de France déchiré par ces guerres de religion. Pour ce faire, elle a organisé le mariage de Marguerite de France, sa fille, une Valois catholique avec Henri de Navarre, un responsable protestant. Les festivités vont être grandioses et tous les grands du royaume sont conviés. Le 18 août 1572 est caniculaire et l’atmosphère est tendue. Les Parisiens voient d’un mauvais œil ces huguenots qui viennent à la noce vêtus de noir comme s’ils étaient en deuil. Les rumeurs, les fausses nouvelles circulent.
C’est la tentative d’assassinat de l’amiral de Coligny qui va envenimer encore la situation d’autant que le tireur était embusqué dans une maison appartenant aux Guise. Catherine et son fils se souviennent aussi de la Surprise de Meaux quand on a essayé de les enlever. La réunion du Conseil étroit n’apporte pas d’autre solution que de tuer. Catherine insiste : “Seulement… les chefs militaires du clan protestant !”
Simona Mogavino et Arnaud Delalande, dans cette trilogie, réhabilitent ce personnage complexe. Ils donnent un récit détaillé, des explications abondantes, des indications sur les multiples implications, sur les protagonistes, sur les courants de pensées, sur le pape qui ne veut pas donner son accord pour le mariage, sur les prélats qui refusent de le célébrer…
Dans un texte érudit, les scénaristes donnent une belle vision d’ensemble et montre la position de Catherine de Médicis et de son fils, le roi Charles IX qui font le maximum pour sauvegarder la paix face aux ambitions des Guise, à celles de François d’Alençon le jeune frère du roi…
Le dessin de Carlos Gomez est très réaliste, ce qui sied à l’esprit du récit. Il exécute des portraits d’une grande beauté, soigne particulièrement les décors et les accessoires, qu’ils soient vêtements, parures ou objets utilitaires. Les planches qui racontent les massacres sont saisissantes tant le dessin est précis, évocateur quant aux monceaux de cadavres jetés dans les rues, dans la Seine.
Salvo assure une mise en couleurs restituant fort bien les tonalités de l’époque où les teintes étaient très présentes, les flamboyances des parures et le sang qui a coulé à flots.
Les auteurs proposent, en trois albums, un récit que les passionnés d’histoire vont trouver à leur goût tant le propos est précis, éclairant une réalité au plus près de la vérité dans l’état actuel des connaissances.
Cette trilogie s’impose comme une bande dessinée de haute tenue.
serge perraud
Simona Mogavino (scénario), Arnaud Delalande (scénario), Carlos Gomez (dessin) & Salvo (couleur), Les Reines de sang — Catherine de Médicis : t.03, Delcourt, coll. “Histoire et histoires”, février 2020, 56 p. – 14,95 €.