Lancelot Hamelin & Luca Erbetta, Dans les eaux glacées du calcul égoïste — livre 2/2 : “La Fin de L’Âge d’or”

Et le scan­dale éclata !

L’Âge d’or est un film scé­na­risé par Luis Bunel et Sal­va­dor Dali, tourné en 1930, en plein essor du sur­réa­lisme pari­sien. Gra­vitent, autour de ce tour­nage, des célé­bri­tés de l’époque dont le nom de quelques-unes a tra­versé l’histoire pour gar­der une cer­taine actua­lité. C’est le cas, notam­ment, de Jean Coc­teau.
Ce film, jugé très sul­fu­reux, a subi les foudres de la cen­sure. Des copies ont cir­culé sous le man­teau sous le titre Dans les eaux gla­cées du cal­cul égoïste, une expres­sion emprun­tée à Karl Marx dans Le Mani­feste du parti com­mu­nisme paru en 1847.

Ce second livre débute en mars 1930, dans les stu­dios de Billan­court. Luis Bunuel s’affaire et donne des indi­ca­tions à Charles de Noailles quant aux par­ti­ci­pants à son film. Il a l’accord de Jean Duver­ger, Max Ernst. Paul Eluard prê­tera sa voix au nar­ra­teur.
Marie-Laure de Noailles est éga­le­ment pré­sente en com­pa­gnie de Natha­lie, la com­pagne de Jean Coc­teau. Ce der­nier, ayant reçu un avis favo­rable de Charles pour le finan­ce­ment de son film ne pense plus qu’à son œuvre. Luis Bunuel refuse une pro­po­si­tion d’un délé­gué de la Metro Goldwyn Mayer pour aller aux États-Unis.

L’Âge d’or ter­miné, les Noailles font une pro­jec­tion dans leur salle pri­vée en atten­dant que le Stu­dio 28, une salle pari­sienne, soit équipé du maté­riel pour émettre le son. Mal­gré le soin pris pour trier les invi­tés, c’est un scan­dale. Des gens sont écœu­rés. Mal­gré cet accueil pour le moins réservé, les Noailles insistent.
Aussi quand le Stu­dio 28 est prêt, ils lancent la pro­jec­tion publique. Le scan­dale enfle et n’est pas sans consé­quences pour tous ceux qui gra­vitent dans la sphère d’influence du couple Noailles…

Ce second volet s’attache à retra­cer le scan­dale pro­vo­qué par la pro­jec­tion de ce film au contenu dérou­tant conte­nant des séquences pro­vo­ca­trices, nourri d’allégories anti-bourgeoises et anti­clé­ri­cales, avec une conclu­sion se réfé­rant clai­re­ment au mar­quis de Sade.
Avec ce dip­tyque, Lan­ce­lot Hame­lin relate avec pré­ci­sion les méca­nismes de la créa­tion de l’œuvre, du scan­dale, les rela­tions dans le couple Noailles, les aven­tures sen­ti­men­tales de Marie-Laure, les liens ambi­gus entre­te­nus avec Jean Coc­teau et Natha­lie, sa compagne.

Intro­dui­sant le per­son­nage de Vir­gil de la Roche, le scé­na­riste place un obser­va­teur qui livre, en même temps, un regard exté­rieur sur ce qu’il voit, ce qu’on lui raconte, ce qu’il res­sent et les rela­tions mal­saines qu’il entre­tient avec Marie-Laure, sa maî­tresse.
Luca Erbetta assure un gra­phisme en cou­leurs directes, pri­vi­lé­giant une domi­nante de teintes sépia. Il res­ti­tue l’atmosphère de ces années où une liberté d’expression ten­tait de faire écla­ter les car­cans issus du droi­tisme et clé­ri­ca­lisme. Sa gale­rie de per­son­nages est très réa­liste, don­nant aux acteurs du drame une res­sem­blance remar­quable avec les modèles.

Un dip­tyque d’une grande éru­di­tion, retra­çant, avec élé­gance, cette période depuis l’origine jusqu’à la conclu­sion de ce scan­dale. C’est seule­ment en 1981 que l’interdiction frap­pant ce film a été levée.

décou­vrir un extrait

serge per­raud

Lan­ce­lot Hame­lin (scé­na­rio) & Luca Erbetta (des­sin et cou­leurs), Dans les eaux gla­cées du cal­cul égoïste — livre 2/2 : La Fin de L’Âge d’or, Glé­nat, coll. “Hors col­lec­tion”, février 2020, 112 p. – 19,50 €.

Leave a Comment

Filed under Bande dessinée

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>