Saint-Just lui-même l’a avoué : « La Révolution est glacée ». A qui en douterait, on ne peut que conseiller la lecture du livre de Jacques Ravenne consacré à la chute de Robespierre.
A la fois récit et roman historique, écrit d’une plume vivante, il nous plonge non seulement au cœur des intrigues conduisant au renversement et à la mort de l’Incorruptible, mais aussi dans la mécanique infernale de la Terreur, alors à son paroxysme.
Jacques Ravenne parvient avec brio à reconstituer une séance hallucinante d’un procès conduit d’une main de maître par Fouquier-Tinville qui envoie à la mort un pauvre bougre décapité sans savoir pourquoi ; mais aussi une scène effroyable – ouvrant le livre – des cadavres des condamnés jetés dans la fosse commune ; et enfin une confrontation terrible entre Fouquier et la malheureuse Teresa Cabarrus, enfermée dans une geôle inhumaine.
Bien plus, il nous fait pénétrer dans la conscience de ces hommes qui ont conduit la Révolution dans sa phase la plus sanglante : Robespierre, Saint-Just et leurs partisans, lancés dans une radicalisation épuratrice mais aussi les membres du Comité de salut public, aux mains couvertes de sang, et qui craignent soudain pour leur propre vie.
Tous ces individus qui ont fait la Terreur, ce temps que Jacques Ravenne résume d’une belle formule : « Si chacun vivait maintenant sous le règne de la fraternité, il n’y avait jamais eu autant de dénonciations et d’arrestations. »
Enfin, notons que le livre permet de réfléchir sur la place de Robespierre. En effet, cet homme finit par incarner la Révolution ou le Peuple, ou les deux, sans aller bien évidemment jusqu’aux extrémités des Etats totalitaires.
La haine pour le pouvoir exécutif, si prégnante dans la Révolution, ne l’aurait pas permis. Il n’empêche. Sa chute entraîne bel et bien celle du système qu’il mit en place et qu’il contrôla.
Un livre à lire donc et à faire lire.
frederic le moal
Jacques Ravenne, La chute. Les derniers jours de Robespierre, Perrin/Plon, janvier 2020, 277 p. — 19,90 €.